En raison de l’escalade de la tension entre Rabat et Paris, la Confédération Générale des Entreprises Du Maroc (CGEM) a demandé à son homologue français, le MEDEF, de reporter sa visite prévue au Royaume. La nouvelle a été relayée par des médias marocains, qui ont déclaré que le président de la CGEM, Chakib Alj, avait demandé à son homologue français, Geoffroy Roux de Bézieux, de repousser sa visite pour une durée indéterminée. M. Alj a attribué ce report à l’état actuel des relations diplomatiques entre le Maroc et la France. Il a souligné le caractère positif de la relation CGEM-MEDEF, qui permettra de coordonner une future visite à un moment plus opportun.
Dans un passé récent, Fabrice Le Saché, vice-président et porte-parole du MEDEF, a minimisé l’impact des tensions diplomatiques entre la France et le Maroc. M. Le Saché a exprimé sa confiance dans les relations économiques fortes entre les deux pays. Il a souligné que les entrepreneurs donnent la priorité à leurs projets économiques par rapport aux considérations politiques, mais a reconnu que des facteurs politiques peuvent entrer en jeu lorsqu’il s’agit de marchés publics.
En avril, suite à la tentative du président Macron de minimiser une crise émergente avec le Maroc, le porte-parole du ministère français des affaires étrangères, François Delmas, a déclaré que les relations avec le Maroc étaient excellentes. Toutefois, peu après, une source de haut rang à Rabat a indiqué que les relations avec la France n’étaient pas aussi chaleureuses que le prétendait M. Macron.
Les indices d’une crise montante avec Rabat, que Paris essaie de cacher, sont évidents, à commencer par la visite prévue de Macron au Maroc au début de l’année, qui n’a toujours pas eu lieu. Des personnalités politiques et des députés marocains ont ouvertement critiqué la France, lui attribuant la mise en danger des intérêts du Maroc au sein de l’Union européenne.
Le parlement marocain a exprimé son indignation à l’égard de Stéphane Séjourné, chef de file de Macron au Parlement européen, pour avoir incité les membres du Parlement européen à adopter une position anti-Rabat. Dans un élan de provocation, un nombre important de législateurs français ont soutenu une résolution anti-marocaine, ce qui a suscité des inquiétudes au Maroc quant à l’avenir des relations avec l’Élysée. De nombreux observateurs ont vu dans cette résolution une tentative de renforcer les chances électorales de certains législateurs de droite.
Alors que l’Élysée continue de soutenir les régimes despotiques africains, il prend ses distances avec son allié de longue date, le Maroc, signe d’un déclin marqué de la politique étrangère de la France sur le continent africain. Ce changement d’alliance aura des conséquences catastrophiques sur les relations de la France avec les autres nations africaines. En outre, la décision de Macron de s’aligner sur des régimes répressifs qui sont confrontés à des défis importants liés à l’instabilité a soulevé des questions sur les priorités de la France dans la région.
La politique étrangère incohérente de la France, qui a nui aux relations avec les gouvernements et les peuples africains, est le reflet du déclin général de l’influence de ce pays.
L’ingérence néfaste de la France dans les affaires intérieures des nations africaines souveraines de la région du Sahel n’est qu’une des critiques formulées à l’encontre de Macron. En fait, la France, sous la direction de Macron, a abandonné le respect mutuel au profit de méthodes d’extorsion. En témoigne la récente réduction du nombre de visas délivrés aux Marocains, une décision dénoncée par Rabat comme ne reflétant pas le degré de coopération consulaire entre les deux pays.
Les médias français ont été accusés de faire de la propagande anti-marocaine, car ils se sont fait l’écho d’allégations non vérifiées selon lesquelles Rabat aurait utilisé le logiciel malveillant Pegasus pour espionner les législateurs français.
Le gouvernement marocain a engagé une action en justice contre l’organe de presse en question et, malgré l’écoulement de plusieurs mois, aucune preuve concrète n’a encore été présentée pour étayer les allégations. Mais la position anti-Rabat de la France est-elle motivée par l’irritation face à l’influence émergente du Maroc au Sahel, où l’ancienne puissance coloniale a subi une série de défaites ?
La présence française en Afrique de l’Ouest est confrontée à des défis importants en raison de la montée de l’opposition à la France et de l’influence croissante de la Russie dans la région. À cet égard, le Burkina Faso a demandé à la France de retirer ses troupes du pays, suite à leur retrait du Mali après une décennie de tentative d’éradication des organisations terroristes.
Au début du mois de mars, Macron s’est rendu dans quatre États africains – le Gabon, l’Angola, le Congo et la République démocratique du Congo – situés dans le golfe de Guinée, riche en ressources naturelles. Ce voyage, son 18e en Afrique, visait à contrer l’offensive de charme de la Chine et de la Russie sur le continent ; ces deux pays renforcent leur présence dans des endroits autrefois considérés comme faisant partie du pré carré français.
Avant d’entamer sa tournée, M. Macron a admis que la France se trouvait dans une “période de transition” avec ses partenaires africains, alors qu’elle tentait de créer des liens qui ne soient pas uniquement axés sur la sécurité. Toutefois, il s’est empressé de souligner qu’aucune des six bases militaires françaises sur le continent ne serait fermée dans le cadre de ce rééquilibrage, soulignant ainsi les défis auxquels les pays africains pourraient être confrontés pour dissocier les objectifs de croissance économique et de développement des préoccupations sécuritaires, auxquelles ils ont longtemps été subordonnés.
L’insistance de M. Macron sur la nécessité de maintenir la présence militaire illégale de la France en Afrique contraste fortement avec les opinions des nations africaines, qui s’opposent de plus en plus à une présence militaire étrangère sur leur continent. Par ailleurs, un récent sondage de l’Institut français d’opinion publique (Ifop) a révélé que 55 % des Français sont favorables à la fermeture des bases militaires de leur pays en Afrique.