Le premier tour de l’élection présidentielle française aura lieu le 10 avril. Le premier tour est ouvert à tout candidat capable de rassembler les 500 parrainages nécessaires. Si un candidat obtient la majorité absolue (50 % plus un) au premier tour, il/elle serait directement élu(e). Toutefois, cela est peu probable au vu du paysage politique actuel et des sondages électoraux. En effet, depuis la fondation de la 5e République en 1958, aucun des candidats à la présidence n’a jamais réuni 50 % des voix au premier tour. Ainsi, la France connaît généralement un second tour de scrutin, organisé 2 semaines plus tard, entre les deux candidats en tête.
Cette année, le second tour de scrutin aura lieu le 24 avril. Le candidat qui obtient le plus de voix au second tour est directement élu président. Néanmoins, la formation du gouvernement intervient plus tard, lors de l’élection législative des membres de l’Assemblée nationale, qui aura lieu un mois après l’élection présidentielle, en deux tours, les 12 et 19 juin 2022.
Les récents sondages ont démontré l’augmentation de la popularité d‘Emmanuel Macron depuis l’annonce de sa candidature début mars. Il semble que sa popularité ait également été stimulée par les incertitudes liées à l’escalade du conflit entre la Russie et l’Ukraine, qui auraient pu réduire le désir de changement politique en France et dans d’autres pays. Néanmoins, selon la presse, environ 40 % des électeurs français sont encore indécis et pourraient changer leurs intentions de vote, ce qui signifie qu’une victoire de Macron n’est pas du tout certaine. À cela s’ajoute le risque d’un taux d’abstention record pendant les élections.
Le soutien à Jean-Luc Mélenchon a augmenté rapidement dans ces dernières semaines
Pourtant, la taille de l’écart entre Macron et la leader du Rassemblement national dans les sondages est très élevée et les chances qu’elle rattrape son retard semblent faibles. En effet, lors du premier tour en 2017, l’écart entre les deux était d’environ trois points seulement, alors que les sondages actuels montrent un écart d’environ dix points. Un autre facteur qui joue en faveur du centriste Macron est que les côtés gauche et droit du spectre politique sont fragmentés. Il y a six candidats positionnés à la gauche de Macron et quatre positionnés à sa droite dans le spectre politique, certains candidats n’obtenant qu’entre un et cinq pour cent des voix. Le candidat vert Yannick Jadot n’obtiendrait qu’environ 5 % des voix. La concurrence entre les candidats de gauche et de droite réduit la probabilité que l’un d’entre eux se retrouve proche de Macron.
Les sondages pour le second tour du scrutin donnent à Macron une nette avance sur tous les autres candidats auxquels il pourrait être confronté. Les sondages suggèrent que Marine Le Pen sera l’autre candidate au second tour, mais le soutien à Jean-Luc Mélenchon (extrême gauche) a augmenté rapidement dans ces dernières semaines, le positionnant en troisième position, bien au-dessus d’Éric Zemmour (extrême droite) et de Valérie Pécresse (centre droit). Malgré tout, Mélenchon devrait gagner environ cinq points supplémentaires pour pouvoir se qualifier pour le second tour. L’avance dans les sondages du second tour de Macron sur Mélenchon est nettement plus importante que l’écart entre Macron et Le Pen.
Le pouvoir d’achat ; le sujet le plus important pour les Français cette année
En effet, l’écart Macron-Le Pen semble s’être réduit par rapport au résultat du vote de second tour de 2017, qui avait été remporté par Macron par 66,1%-33,9%. Cela pourrait être dû au fait que Le Pen a essayé de devenir plus acceptable pour l’électeur français moyen. Elle a abandonné des politiques impopulaires comme la sortie de l’euro, et a éloigné sa rhétorique politique du sujet traditionnel de l’immigration/l’insécurité pour se concentrer davantage sur la liberté nationale (liée aux restrictions de la pandémie) et même sur les questions environnementales. Mais surtout, Marine Le Pen a su s’approprier le sujet le plus important pour les Français cette année : le pouvoir d’achat. Elle a axé sa campagne sur ce thème depuis le début et s’est présentée comme celle qui va « rendre aux Français leur argent ».
Des récents sondages montrent que la participation au vote du premier tour se situerait autour de 68%, ce qui en ferait le plus faible taux de participation depuis les élections de 2002 où 28,4% des électeurs français n’ont pas voté. Lors des élections de 2017, 74% des électeurs français se sont rendus aux urnes. Il semble que l’avance significative de Macron dans les sondages ait réduit l’intérêt de certains électeurs. Car elle indique que les élections sont déjà une affaire réglée, tandis que d’autres pourraient ne pas être intéressés car les chiffres un et deux sont le même duo qu’en 2017.
La présidentielle française ; une occasion d’évaluer l’impact dans les urnes de la guerre lancée par Poutine
Un taux d’abstention élevé profitera probablement à certains candidats plus qu’à d’autres. Il serait moins désavantageux pour des candidats comme Éric Zemmour dont l’électorat est très passionné et Valérie Pécresse, qui attire surtout les personnes âgées qui ont tendance à voter plus en moyenne. Un taux d’abstention élevé serait également relativement favorable à Emmanuel Macron dont l’électorat est composé de personnes âgées, de familles à hauts revenus et de professionnels très instruits, catégories qui n’ont pas tendance à s’abstenir lors des élections.
Pour autant, l’histoire a montré qu’il est difficile de mobiliser des partisans du président en exercice pour une réélection. Ce risque d’indifférence est également perçu comme un risque pour le soutien de Macron car il pourrait conduire à un score plus faible que prévu. Enfin, Marine Le Pen semblerait être la plus touchée par un taux d’abstention élevé, puisque son électorat est principalement composé de jeunes et d’électeurs à faibles revenus qui font partie de la population qui a tendance à moins se présenter le jour des élections.
La présidentielle française sera également l’occasion d’évaluer l’impact dans les urnes de la guerre lancée par Poutine le 24 février. Les sondages reflètent ce que l’on appelle l’effet de drapeau : en temps de crise, les gens ont tendance à resserrer les rangs autour d’un leader. L’actuel président, Emmanuel Macron, a consolidé sa position de favori, même s’il a perdu un peu de terrain ces derniers jours face à sa rivale principale de l’extrême droite, Marine Le Pen. Comme dans la dernière ligne droite de la précédente campagne en 2017, le leader de la gauche populiste, Jean-Luc Mélenchon, s’est imposé comme le candidat du vote utile de la gauche et estime avoir une chance d’accéder au second tour.