Les Jeux olympiques de 2024 poussent la France vers une société de surveillance

Francoise Riviere
8 Min Read

Les Jeux olympiques de 2024 suscitent des préoccupations au sein de l’armée française quant à la possibilité d’être sollicitée pour renforcer la sécurité de l’événement. L’ampleur de la tâche et les ressources nécessaires pour garantir la sécurité des Jeux posent des défis majeurs. Alors que les plans de sécurité sont en cours d’élaboration, l’armée s’inquiète de sa capacité à faire face à une éventuelle mobilisation pour soutenir les forces de sécurité civiles. La participation de l’armée dans des événements tels que les Jeux olympiques est complexe, car cela nécessite une planification minutieuse et une coordination avec d’autres acteurs de la sécurité. Les inquiétudes portent notamment sur la disponibilité des effectifs, les compétences spécialisées nécessaires et les conséquences potentielles sur les missions militaires en cours. Trouver suffisamment d’agents de sécurité pour assurer la surveillance des 40 sites olympiques représente un défi pour les organisateurs des Jeux olympiques de Paris 2024. Le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) estime qu’il est nécessaire d’avoir en moyenne 17 000 agents par jour pendant la durée des Jeux, avec un pic de 22 000 personnes.

Cependant, il n’y a actuellement aucune certitude quant à la possibilité d’atteindre cet objectif. Le Cojop a révélé les résultats du premier appel d’offres lancé en avril 2022 auprès des acteurs du domaine de la sécurité. Les résultats du deuxième appel d’offres, réalisé en décembre 2022, ne sont pas encore connus. Un troisième appel d’offres ne sera lancé qu’en avril. Ce n’est qu’à la fin de l’année 2023 que Paris 2024 pourra avoir une vision précise de ses besoins en matière de sécurité. Le responsable de la sécurité du Cojop, Thomas Collomb, affirme que tout est dans les temps. Cependant, les résultats du premier appel d’offres ne sont pas rassurants : 32 des 136 lots proposés n’ont pas pu être attribués, soit faute de candidats, soit parce que les candidats ne fournissaient pas suffisamment de garanties. Seuls 28 prestataires ont été retenus, principalement des PME françaises de taille moyenne, dont un tiers sont des spécialistes de l’événementiel et les autres sont des acteurs de la sécurité généralistes.

Au fil des mois, l’idée d’un éventuel recours à l’armée pour assurer la sécurité des Jeux olympiques suscite de plus en plus d’inquiétudes, au point de susciter des préoccupations au sein des états-majors. Travaillant en étroite collaboration avec tous les acteurs de la sécurité des Jeux, ils redoutent un scénario catastrophique similaire à celui des Jeux olympiques de Londres en 2012. Ces préoccupations sont telles qu’ils estiment nécessaire de les communiquer. Le général Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées, a affirmé lors d’une audition devant la commission Défense de l’Assemblée nationale que les armées contribueront aux Jeux olympiques en tant qu’événement international majeur pour la France. Il a souligné que les forces armées font partie du dispositif de sécurité en cours de renforcement et ont un contrat de 10 000 personnels dans le cadre de l’opération Sentinelle sur le territoire national. Cependant, en raison de l’aspect exceptionnel des Jeux, une contribution exceptionnelle des armées est envisagée pour anticiper les éventualités de dernière minute.

Les incertitudes mentionnées par le chef d’état-major des armées concernent la mobilisation nécessaire de 22 000 agents de sécurité privée pour assurer la sécurité des sites de compétition. Cependant, les entreprises de sécurité privée rencontrent des difficultés de recrutement et ne se précipitent pas pour répondre aux appels d’offres. Le recours éventuel aux armées pour renforcer partiellement la sécurité privée reste une possibilité envisagée, mais aucune décision n’a encore été prise à ce stade, selon les déclarations du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et du directeur général du comité d’organisation des JO de Paris, Etienne Thobois.

Le projet de loi sur les Jeux olympiques, actuellement examiné au Sénat, comprend plusieurs mesures en matière de sécurité, notamment l’autorisation de la vidéoprotection augmentée, avec l’analyse en temps réel des images par l’intelligence artificielle. Cette avancée technologique a été votée hier par la majorité sénatoriale, suscitant des craintes chez certains qui dénoncent un nouveau “Big Brother”. Cependant, les seuls algorithmes ne seront pas suffisants pour assurer la sécurité des Jeux olympiques. Il sera nécessaire d’avoir de nombreuses personnes. À tel point que certains commencent à envisager de recourir à l’armée. Un amendement en ce sens a été déposé par le sénateur PS de Paris, David Assouline, avant d’être retiré. Il a défendu cette mesure exceptionnelle et efficace pour pallier le manque éventuel de forces de l’ordre. Laurent Lafon, président centriste de la commission de la Culture et de l’Éducation, considère cette hypothèse comme crédible et réaliste, étant donné la difficulté de trouver les 22 000 personnes nécessaires pour la sécurité privée. Il demande que le scénario du recours à l’armée soit officiellement annoncé de manière claire.

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a répondu longuement à cette question. Bien qu’il soit encore un peu tôt pour le dire, il ne semble pas écarter cette possibilité de recourir à l’armée en dernier recours. Selon lui, l’État est là pour combler les défaillances de sécurité si le Comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojo) ou les collectivités ne sont pas à la hauteur de leurs engagements.

Avant d’en arriver là, il souligne la question de notre capacité en matière de sécurité, déjà renforcée par la loi Lopmi, ainsi que celle de la sécurité privée. Il mentionne le besoin de 22 000 agents de sécurité privée pour les Jeux olympiques, qui sont déjà très sollicités par de nombreux autres événements. Il évoque également la question de l’hébergement, en soulignant qu’il faudra loger à Paris et dans sa proche banlieue entre 35 000 et 40 000 policiers et gendarmes, ainsi que plusieurs milliers d’agents de sécurité privée qui ne sont pas parisiens. C’est un problème majeur sur lequel ils travaillent actuellement.

La discussion du projet de loi relatif aux Jeux olympiques et paralympiques au Sénat a révélé un aspect majeur et discret : un ensemble de mesures sécuritaires pour l’organisation des JO de Paris 2024.

L’article 7 de ce projet de loi a été adopté au Palais du Luxembourg, validant ainsi l’expérimentation controversée de la vidéosurveillance “augmentée” ou algorithmique (VSA). Il s’agit de la première utilisation en France d’une intelligence artificielle capable d’analyser en temps réel les images des drones et des caméras de surveillance.

Pour ses partisans, cette technologie offre des garanties de sécurité dans le cadre de cet événement à haut risque. Cependant, ses détracteurs craignent qu’elle ne fasse basculer la doctrine du maintien de l’ordre vers une “société de surveillance”.

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