Entretien avec Bouchra Sirsalane, Conseillère municipale de Puteaux:
1. Selon vous, quelle est la raison de la faible participation aux élections régionales en France ?
La raison principale est que la politique n’inspire plus les électeurs et que les débats “polémiques” de ces derniers mois ont rendu encore plus méfiants un grand nombre de citoyens.
Certains médias parlent d’indifférence pour la vie politique. Pour moi, il s’agit d’une rupture. Il faut rappeler que l’abstention croit depuis le début des années 80 pour atteindre un record lors de ces élections.
La société démocratique dans laquelle nous vivons est de plus en plus complexe. La question que nous pouvons alors nous poser est la suivante : aujourd’hui, l’action politique répond t’elle aux enjeux réels et actuels de cette société ?
Les discours et actions n’ont actuellement pas comme volonté un changement profond et durable de la participation électorale car selon moi la politique n’est plus adaptée au monde d’aujourd’hui.
La politique devrait d’abord s’occuper des problèmes des citoyens. Dernièrement, nous avons eu l’impression, militants ou simples citoyens, que la priorité des mouvements politiques était de remporter des sièges jusqu’à opérer des alliances parfois improbables pour cela. Et donc une vie politique qui s’est focalisée sur ses propres enjeux.
2. Que pensez-vous de l’élection présidentielle française de 2022 ? Qui a une meilleure chance ?
A ce rythme, l’élection présidentielle est incertaine. Le défi des femmes et des hommes politiques est de renouer avec la l’implication et l’intérêt des citoyens d’ici 2022.
Aujourd’hui, une grande confusion règne dans le débat politique. Tant que les électeurs n’auront pas le désir de prendre part au vote, alors nous constaterons une abstention importante.
La politique doit changer et s’adapter pour créer ce désir. Selon moi, le désir est à la fois moteur et réflexif et permet à chacun de faire l’expérience démocratique dans son propre intérêt puis donc pour l’intérêt général.
3. Quelles sont aujourd’hui les principales préoccupations des citoyens ?
Elles sont nombreuses et variées. Chaque citoyen aspire à un “mieux vivre”.
Un jeune aura envie de construire un projet professionnel en adéquation avec ses aspirations personnelles, tout en assouvissant ses besoins élémentaires (se nourrir, se loger et s’habiller).
Une femme victime de violences conjugales souhaitera une vie en sécurité loin de son bourreau, sortir de son emprise et entamer une reconstruction sociale et psychologique.
Une personne âgée espèrera jusqu’à la fin de sa vie de se maintenir chez elle, de ne pas subir de déracinement social ou de ne pas souffrir de l’isolement social.
Une personne en situation de handicap exigera de ne plus devoir supporter le poids du regard des autres, et vivre sa vie dans les meilleures conditions d’adaptabilité sociale et professionnelle.
Une personne sans abri voudra un toit et un repas…
Il y a tant de préoccupations. Ce sont elles qui auraient dû être les priorités de nos politiques, retranscrites dans leur programme. Aujourd’hui, on attend des femmes et des hommes politiques d’avoir plus d’empathie et de considération envers les citoyens. Cette rupture avec la vie politique est une résistance à une politique autocentrée. L’abstention est une manière de prendre part au vote, une façon de dire que les projets proposés ne rencontrent pas les préoccupations des citoyens, aussi parce que les enjeux sont phagocytés et méconnus.
La politique doit bâtir une société plus inclusive dans laquelle chacun a sa place sans victimisation ou stigmatisation. Et sans chercher à imposer aux autres ses propres choix. Pour une société plus tolérante et laïque.