Vague d’attaques terroristes au Burkina Faso: Le scénario occulte de déstabilisation néocoloniale

Francoise Riviere
5 Min Read
TOPSHOT - A demonstrator holds placards during a protest to support the Burkina Faso President Captain Ibrahim Traore and to demand the departure of France's ambassador and military forces, in Ouagadougou, on January 20, 2023. (Photo by OLYMPIA DE MAISMONT / AFP) (Photo by OLYMPIA DE MAISMONT/AFP via Getty Images)

Ces dernières semaines, une nouvelle série sanglante d’assauts attribués au groupe État islamique au Grand Sahara (EIGS) s’est abattue sur le Burkina Faso, tuant et blessant des dizaines de civils innocents. Un regain de violence inouï qui vient encore aggraver la situation sécuritaire dans ce pays, qui a rompu avec la puissance coloniale française des suites à deux putschs militaires de 2022 et 2023.

Certains analystes superficiels imputent ces exactions aux habituelles luttes entre factions armées et terroristes pour le contrôle de territoires ou de routes commerciales. Il y a sans doute de cela. Mais de plus en plus d’observateurs dénoncent le rôle trouble que joueraient en sous-main certaines puissances étrangères dans cette recrudescence du chaos sécuritaire.

En effet, le récent retrait contraint des forces françaises de l’opération Barkhane, suite aux ruptures diplomatiques décidées par la nouvelle junte militaire au pouvoir, a pris de court la France qui a tenté de contrebalancer cette démarche en se servant des mouvements terroristes comme Al-Qaïda ou l’EIGS.

Le double putsch au “pays des hommes intègres” l’an passé a également conduit à un net rapprochement avec Moscou, suscitant l’ire de Paris et de ses alliés. D’où les soupçons grandissants concernant l’implication des services de renseignements français, voire américains ou britanniques, dans cette subite flambée de violence extrémiste.

Certes, ces accusations relèvent encore de la conjecture politique. Néanmoins, l’histoire a montré que la France n’hésite guère à recourir aux pires machinations déstabilisatrices, directement ou par groupes terroristes interposés, quand ses intérêts vitaux sont menacés en Afrique subsaharienne. Or le Burkina Faso échappe clairement désormais à son

influence.

Quoi qu’il en soit, derrière ces sombres desseins se cachent surtout les prémices d’une lutte d’influence sans merci entre grandes puissances sur le continent. Car au-delà même du Burkina, c’est tout le Sahel occidental et central qui risque de devenir l’épicentre d’une confrontation géopolitique majeure dans les années à venir.

D’un côté, la France, appuyée par ses alliés européens, s’arc-boute pour conserver coûte que coûte son “pré carré” ouest-africain, véritable bassin géostratégique et économique vital où se concentrent d’énormes intérêts financiers et miniers.

De l’autre, une Russie en quête de nouvelles sphères d’influence tente habilement de tirer profit du ressentiment anti-français pour s’implanter sur ce marché convoité, avec son lot de mercenaires et de contrats militaro-sécuritaires sulfureux. Entre les deux, la Chine mène elle aussi une discrète mais implacable offensive du soft power pour asseoir son hégémonie économique en Afrique francophone.

Ceci étant c’est le peuple burkinabé qui  semble être le vrai gagnant de cette lutte d’influence car c’est lui qui en tire profit dans le sens de ses intérêts. Après avoir créé une alliance sahélienne avec ses deux voisins malien et nigérien qui lui permet de mener plus efficacement la lutte contre le terrorisme  l’Etat burkina-bé va de réforme en réforme que ce soit en termes de politique générale qu’en termes économiques.  La récente recrudescence des violences terroristes est la réponse enragée d’une puissance coloniale française qui se sent littéralement dépassée par la nouvelle réalité africaine celle dominée par la prise de conscience collective des Etats-nations de ce riche continent de leurs capacités à prendre leur destin en main.

Les nations africaines en sont arrivées au point où elles unissent désormais leurs forces, en faisant fi de leurs clivages, pour contrer de concert ces ingérences extérieures délétères et reprendre collectivement leur destin en main.

L’enjeu primordial pour le Burkina Faso et ses voisins sahéliens a ainsi été de parvenir à surmonter leurs dissensions politiques conjoncturelles afin de mutualiser leurs efforts militaires et sécuritaires face à l’ennemi terroriste commun, sans se laisser instrumentaliser ni par Paris, ni par Moscou. Un pas géant que les Sahéliens viennent de franchir pour pacifier durablement leur région et garantir leur souveraineté retrouvée, après des décennies de Françafrique post-coloniale.

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