L’Europe face à une situation économique sans précédent ; Les plans fiscaux de Macron pour les entreprises

Francoise Riviere
8 Min Read

La retenue fiscale de la France et de l’Allemagne sur les bénéfices des entreprises est inutile. Paris et Berlin excluent d’appliquer le droit d’accise européenne aux entreprises bénéficiant de l’inflation. Les gouvernements de la France et de l’Allemagne ont choisi une étrange façon de se détacher du troupeau européen. Alors que d’autres grandes économies prélèvent une taxe spéciale sur les groupes énergétiques et autres entreprises qui profitent de l’inflation des prix des denrées alimentaires et de l’énergie, les deux plus grandes puissances de la zone euro refusent de le faire. Mais ils pourraient ne pas bénéficier autant qu’ils l’espèrent du renouvellement de leurs références pro-entreprises en période de crise.
Le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne ont, de différentes manières et pour différents secteurs, demandé une contribution spéciale aux entreprises qui ont prospéré grâce à la hausse des prix de l’énergie, à la reprise post-pandémique ou à la hausse des taux d’intérêt. Paris et Berlin ont des raisons différentes de retarder. La France, parce que le président Emmanuel Macron a été réélu en mai sur un programme qui promettait de ne pas augmenter les impôts. L’Allemagne, parce que le ministre des finances, Christian Lindner, un libéral, dit qu’il ne voit pas la logique économique d’une telle taxe.
Bien que les droits d’accise soient controversés, à commencer par la définition délicate de ce qui constitue exactement un profit « exceptionnel », l’énorme quantité de dépenses supplémentaires que les gouvernements doivent effectuer pour faire face à la crise actuelle justifierait une telle mesure. Ils peuvent être financés par les impôts ou par un recours accru à l’emprunt. L’Allemagne, peu endettée, pouvait se permettre d’emprunter davantage, malgré l’obsession de Lindner pour les déficits. Plus difficile serait pour la France, criblée de dettes, qui semble préférer faire pression sur les entreprises pour qu’elles fassent ce qu’il faut ; par exemple, elle demande à TotalEnergies de baisser le prix de l’essence à la pompe.
Lindner et son homologue français, Bruno Le Maire, ont tous deux laissé entendre que la taxation des services publics ou des compagnies pétrolières compromettrait leurs efforts pour faire de leurs pays respectifs des destinations attrayantes pour les investissements mondiaux. En effet, les menaces de l’industrie de réduire les investissements si de telles taxes sont imposées doivent être prises avec une certaine réserve.
C’est particulièrement vrai dans le cas des investissements directs. Les entreprises impliquées dans l’exploration de la mer du Nord britannique ne trouveront pas du jour au lendemain d’autres utilisations pour leurs capitaux en Allemagne ou en France. En outre, la charge fiscale globale du Royaume-Uni, qui représente environ 37 % du PIB, reste bien inférieure à celle de la France (51 %) ou de l’Allemagne (47 %), selon le Fonds monétaire international.
Dans la perspective d’un ralentissement économique mondial majeur l’année prochaine, les investisseurs internationaux seront peut-être mieux à même d’évaluer si les réponses des différents gouvernements à la crise permettront d’éviter un effondrement économique majeur. Ils peuvent commencer à regarder comment ils dépensent l’argent, plutôt que comment ils le collectent.
Entre temps, en 2021, un euro équivalait généralement à 1,20 dollar US avant de descendre régulièrement à 1,13 dollar US au début de 2022. La monnaie a ensuite provoqué une onde de choc économique en juillet 2022 en passant sous la barre des 1 dollar US avant de remonter à 1,02 dollar US le 20 juillet. La monnaie européenne a ainsi chuté de 19 % depuis son plus haut en janvier 2021, et de 37 % depuis son plus haut historique en avril 2008. À une valeur presque identique à celle du dollar américain, la dépréciation de l’euro est désormais un fardeau pour les économies européennes, qui doivent faire face à une inflation galopante et à un environnement commercial vulnérable après la pandémie.
La dépréciation de l’euro s’explique par deux facteurs principaux. Le principal d’entre eux est le relèvement des taux d’intérêt par la Réserve fédérale américaine (Fed), qui a entraîné l’appréciation du dollar américain. Afin de freiner l’inflation, la Fed a relevé ses taux d’intérêt de référence jusqu’à 0,75 point, invoquant un risque de récession. Pendant ce temps, la Banque centrale européenne (BCE) est prise dans un dilemme : alors qu’elle identifie la nécessité de relever le taux d’intérêt pour amortir l’inflation galopante, l’économie de l’UE est encore vulnérable après la pandémie et souffrirait de taux d’intérêt élevés.
La flambée de l’inflation est également due à la pénurie d’approvisionnement en énergie provoquée par la crise russo-ukrainienne. L’UE est fortement tributaire des approvisionnements énergétiques en provenance de la Russie et, par conséquent, les pénuries d’approvisionnement en énergie ont fait grimper les prix pour les Européens qui ont déjà du mal à se remettre de la pandémie. La dépréciation de l’euro n’a pas seulement des conséquences pour l’UE, mais aussi pour d’autres économies, comme le Vietnam.
La faiblesse actuelle de l’euro reflète les craintes des investisseurs d’une récession imminente dans la zone euro. Depuis le début de la guerre en Ukraine, nous avons fortement révisé nos prévisions de croissance pour 2022 pour la zone euro, de 4 % à 2,2 %. Les perspectives pour l’année prochaine sont sombres, avec une croissance prévue de seulement 1,6 %, car les effets de report du fort rebond post-coronavirus de 2021 se dissipent. Le bloc est particulièrement touché par la récente hausse des prix mondiaux de l’énergie, qui alimente l’inflation dans la zone euro. Le 12 juillet, la dernière lecture du sentiment des investisseurs allemands a été fortement négative, entraînant une forte dépréciation de la monnaie européenne par rapport au dollar américain.
Les entreprises européennes réalisent la plupart de leurs échanges avec d’autres entreprises de l’UE, en euros. Toutefois, elles ressentiront toujours l’impact de la dépréciation de l’euro par rapport au dollar américain : la pression sur la monnaie européenne rendra plus chères les importations de matières premières et de produits énergétiques, ce qui ajoutera aux difficultés liées aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement et alimentera l’inflation, tant pour les producteurs que pour les consommateurs. Il est actuellement fort probable que l’inflation sera de plus de 6 % en moyenne dans la zone euro cette année, les risques étant orientés à la hausse des prix.

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