Après la date limite d’inscription à l’élection présidentielle, les sondages montrent qu’Emmanuel Macron gagne en popularité. A un peu plus d’un mois du premier tour de l’élection présidentielle, le chef de l’Etat, désormais officiellement candidat à la présidentielle, est non seulement en tête de la course, mais aussi encore loin derrière ses deux rivaux, les rivaux d’extrême droite Marine Le Pen et Éric Zemmour. La guerre en Ukraine et le traumatisme qui en résulte parmi les électeurs jouent un rôle important dans la tourmente de la campagne présidentielle.
Les résultats du sixième tour des sondages menée par IpsosSopra Steria en collaboration avec le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) et la Fondation Jean Jaurès pour Le Monde sont bien instructifs. La force de cette enquête est son ampleur, car un échantillon de 13 651 personnes a été utilisé. Le sondage s’est déroulé du 24 au 27 février, début de l’invasion russe de l’Ukraine, un événement qui rend plus difficile une campagne, jusque-là perturbée par le Covid 19 et les restrictions sanitaires.
Les résultats des sondages s’annoncent très intéressants : en moins d’une semaine, Emmanuel Macron a progressé de 4 points. De 26,5% à 30,5% d’intentions de vote. Ses concurrents s’érodent : Marine Le Pen a perdu 1 point avec 14,5 %, Éric Zemmour, 2 points, 13 % et Valérie Pécresse, 1 point, 11,5 %. Les deux candidats d’extrême droite ont perdu du terrain en raison de leur soutien passé à Vladimir Poutine. Mais la surprise de ce sondage est Jean-Luc Mélenchon, qui a gagné 0,5 point et ses votes atteignent 12 %.
Supériorité de Macron s’accroît, mais tout peut encore changer !
La guerre aux portes de l’Europe, l’épidémie qui n’est pas encore terminée… La situation à la veille de l’élection présidentielle est inédite. Cette séquence de crises renforce la popularité du président, permettant à Emmanuel Macron d’être en avance par rapport aux autres candidats. Bien sûr, tout peut encore changer. Néanmoins : la supériorité de Macron s’accroît selon les sondages. Début mars, son score potentiel est le double de celui de sa principale rivale, Marine Le Pen.
La majorité des sondés se disent préoccupés par la guerre en Ukraine, et c’est leur deuxième préoccupation après le pouvoir d’achat. Les fluctuations de la situation internationale et l’inquiétude qui en résulte favorisent une personne déjà installée au pouvoir. Cette personne n’a pas besoin de prouver son « statut présidentiel » et est reconnue comme garante de la stabilité intérieure.
Le chef de l’Etat est désormais un acteur de premier plan et travaille à une solution diplomatique avant même le début des hostilités. Ainsi, une partie des électeurs le considèrent comme la personne la plus apte à diriger le pays en cette période mouvementée. Un avantage certain pour M. Macron, qui s’est d’ailleurs confirmé avant l’invasion russe.
Le « tortue sage » de l’élection présidentielle, a dépassé la candidature de Valérie Pècresse
Désormais, M. Mélenchon, un leader fort de la gauche, peut même espérer faire de nouveaux progrès. Celui qui a théorisé la stratégie du « trou de souris » pour atteindre le second tour et se qualifie de « tortue sage » dans la course à la présidentielle. Il a toutefois dépassé la candidate de droite conservatrice, Valérie Pécresse. Il peut même croire au dépassement d’Éric Zemmour. Si ce député à l’Assemblée nationale réussit à apparaître comme le « vote utile » de son camp politique, la surprise pourrait venir de la gauche. Mais ces dynamiques sont désormais fortement liées au contexte international.
Le quinquennat d’Emmanuel Macron touche à sa fin alors que la guerre fait rage aux portes de l’Europe. Suite à la crise sociale des « Gilets jaunes » et à la crise sanitaire du « Covid 19 », une nouvelle menace perturbe la présidence de la République et bouscule la campagne électorale. Si la crise ukrainienne, comme les deux crises précédentes, n’affecte pas le quotidien des Français, elle créera un climat profondément anxieux qui aura des conséquences sur les choix des citoyens.
Habituellement, deux types d’intentions de vote peuvent être distingués parmi ceux qui participent aux élections présidentielles : Le premier groupe est celui des personnes qui votent pour améliorer leurs conditions de vie personnelles. Le deuxième groupe est composé de personnes qui votent pour un point de vue plus collectif. Une incitation qui vise à renforcer la cohésion du pays et à contribuer à la construction d’une société nationale.
Les Français sont désireux de passer la présidence au candidat le mieux préparé pour réduire les désordres internes et externes
La majorité des sondages dans ce domaine montre qu’en fait ce deuxième modèle, qui met l’accent sur l’intérêt public, prévaut dans les élections démocratiques. La France ne fait pas exception. Quel que soit le candidat choisi par les Français, ils estiment que leur vote est plus dans l’espoir d’améliorer le pays que dans leur situation personnelle.
La différence entre Macron et Le Pen peut sembler minime. Mais ce qui distingue le président du candidat du Rassemblement national (RN), c’est l’impact des suffrages exprimés pour améliorer le pays. Cela signifie que les gens iront aux urnes en imaginant que la situation dans le pays se dégrade et préféreront Emmanuel Macron.
En revanche, au niveau des sondages qui se distinguent par une focalisation sur l’intérêt personnel, les sondages d’opinion montrent des résultats significatifs, puisque Marine Le Pen convaincs 21 % des électeurs sur leur capacité à améliorer leur propre destin. Ce résultat correspond aux vives inquiétudes des électeurs à l’égard de la candidate du Rassemblement national sur les questions de pouvoir d’achat.
La prédominance de ceux qui pensent dans l’intérêt collectif, dans ces circonstances incertaines, souligne le fait que les Français sont désireux de passer la présidence au candidat le mieux préparé pour réduire les désordres internes et externes. En fait, toute crise crée de l’incertitude, qui à son tour suscite des sentiments d’inquiétude et d’anxiété, et devient ensuite une préférence conservatrice dans les urnes.
Zemmour : « Le conflit entre les frères russes et ukrainiens nous éloigne du véritable choc des civilisations »
De l’autre côté, le chef du parti LFI, Jean-Luc Mélenchon avait initialement entre 8% et 9% des voix. Ce chiffre atteint maintenant 12 %, et son augmentation est l’un des nouveaux événements électoraux. En comparant Jean-Luc Mélenchon à d’autres candidats, on peut comprendre les motivations des électeurs : Par rapport aux autres candidats, ceux qui votent pour Jean-Luc Mélenchon ont des tendances idéologiques distinctes, et cela leur tient particulièrement à cœur, car il devance désormais nettement les autres candidats de gauche. Le problème, c’est qu’il doit réussir à mobiliser les électeurs qui s’abstiennent actuellement. Jean-Luc Mélenchon fait également face à d’importants problèmes. L’un d’eux est Fabien Roussel, dont la candidature est en plein essor et rassemble des sympathisants du Parti communiste. Un autre problème pour lui est Vladimir Poutine. La guerre contre l’Ukraine lancée par le président russe rend difficile la justification des positions antérieures de ce candidat.
Zemmour, pour sa part, a d’emblée condamné l’invasion russe, mais continue de tenir l’OTAN « responsable ». Il s’oppose aux sanctions et à la livraison d’armes aux Ukrainiens, et propose à la France de quitter l’OTAN et de signer un accord interdisant à l’Ukraine de rejoindre la coalition. Ces doutes sont liés à sa vision géopolitique de « l’allié » de la Russie. Éric Zemmour a salué le « patriotisme héroïque » du président Zelensky, mais a immédiatement ajouté que « Poutine est un patriote » qui « défend son pays ». Il tente une troisième voie : il limite la guerre à un conflit régional et tourne l’attention des médias vers l’immigration. « Le conflit entre les frères russes et ukrainiens nous éloigne du véritable choc des civilisations », a-t-il déclaré jeudi au salon de l’agriculture. Nos principaux problèmes se situent au sud, pas à l’est. Son équipe illustre cela avec des vidéos d’immigrants africains essayant d’entrer en Europe.