« Le traître et le néant », un livre de 630 pages est une enquête qui a été publiée sur la vie et le travail d’Emmanuel Macron en tant que président de la République. Les étapes précédentes de sa carrière, en tant que fonctionnaire et banquier, sont également abordées. Gérard Dave et Fabrice ont passé au moins quatre ans à collecter des documents. “Le traître et le néant” est une vivisection politique des activités du huitième président de la Cinquième République, dans laquelle chaque affirmation est confirmée par des faits, des chiffres et des preuves.
Le portrait du chef de l’État, qui souligne avec insistance et constance et son adhésion à toutes les vertus, s’avère en fait, comme les auteurs ont pu le constater, « un menteur et un manipulateur », dont les manières politiques de résoudre les problèmes non seulement ressemblent à l’époque absolutiste, mais correspondent aussi exactement au fameux « L’État, c’est moi ! » Mais si Louis XIV, à qui l’on attribue cette phrase, a recueilli le pays, protégé sa culture, et n’a pas reculé devant la gloire de la France, alors Macron agit (comme il ressort clairement de ce qui est dit dans le livre) de manière diamétralement opposée.
Un vrai dilemme de François Bayrou
« Trahi » par l’équipe d’Emmanuel Macron sur la place du MoDem à l’Assemblée en 2017, son allié François Bayrou s’est vu proposer une compensation financière qu’il a refusée, affirment les journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme dans leur livre Le traître et le néant. Les auteurs, qui précisent avoir prévenu la centaine d’interlocuteurs qu’ils enregistraient leurs entretiens, citent François Bayrou expliquant qu’il a passé un accord avec Emmanuel Macron peu après son élection en mai 2017 pour diviser les 577 circonscriptions, dont 144 pour le MoDem. Mais le lendemain, le secrétaire général du parti LREM Richard Ferrand annonce seulement 16 circonscriptions pour le MoDem.
François Bayrou voit rouge mais Emmanuel Macron reste silencieux. François Bayrou « est revenu à la charge. Et puis finalement il a fait main basse » sur des circonscriptions et a obtenu une cinquantaine de sièges de députés, résument les auteurs à l’AFP. Surtout, certains macronistes ont « laissé entendre qu’ils pouvaient payer, nous donner de l’argent pour compenser », écrivent Gérard Davet et Fabrice Lhomme, citant François Bayrou qui calcule, selon eux, la somme de « quatre millions d’euros ». Interrogé par l’AFP, l’entourage de Richard Ferrand, devenu depuis président de l’Assemblée nationale, a déclaré ne pas être « au courant » qu’un tel marché ait pu être proposé.
« Il y a eu ce moment de tension autour du nombre de députés que nous allions avoir. Et effectivement des mots malheureux ont été prononcés en disant « si vous n’avez pas le nombre de députés, nous pouvons vous garantir des ressources » », a-t-il déclaré. Son camp a expliqué mercredi François Bayrou, interrogé sur Europe1.
« Sarko m’a tuer », cinq ans après « Un président ne devrait pas dire ça »
Cinq ans après la publication d’un livre sur l’ancien président français François Hollande, « Les présidents ne devraient pas parler comme ça », le livre « Sarko m’a tuer » sur Nicolas Sarkozy a été publié dix ans plus tard. Ce nouveau livre, basé sur son blog d’investigation (plus de 600 pages), avec une ouverture et une franchise absolue, recueille les témoignages de 110 fonctionnaires français bien connus et du président Macron avant et après son entrée à l’Élysée. Les deux journalistes ont souligné que ce livre n’est pas un « procès », mais qu’il révèle les coulisses de la promotion d’Emmanuel Macron à la présidence et le vide idéologique vécu par le « Mouvement République en marche ». Ce qui explique le choix du titre : « Traître » est Emmanuel Macron, et « Néant » est sa grande politique et sa tendance.
Hollande a donné à Macron l’opportunité d’occuper de multiples postes à responsabilités sans amis, presque sans famille, et les plus proches collaborateurs, le Premier ministre Jean Castex et Alexis Kohler, le secrétaire général de l’Élysée, qui restent silencieux. Ce dernier n’a pas répondu aux sollicitations de Gérard Davet et Fabrice Lhomme. Cette solitude pousse Emmanuel Macron à gouverner à l’instinct et à l’intuition : “Dans la gestion de Covid-19 et dans d’autres affaires, ils avaient parfois de grandes intuitions et parfois beaucoup moins bonnes”, ajoute Gérard Davet. Est-ce le mode de fonctionnement initial du président de la République ou la conséquence des « trahisons » évoquées par les deux journalistes ? Car ils l’assurent, Emmanuel Macron a « trahi tout le monde » : « Si on qualifie le macronisme d’opportunisme, c’est la définition la plus proche », assure Fabrice Lhomme.
« Il a trahi François Hollande, il a trahi le Parti socialiste et il y a une cohorte de déçus autour de lui, beaucoup plus importante que pour les autres présidents. Il a revendiqué la bienveillance mais il ne l’est pas non, la bienveillance en politique, ça n’existe pas. Tout cela c’est de la trahison envers les Français et l’électorat de gauche », ajoute Gérard Davet.
Un pays qui « n’a qu’un seul choix, celui de l’extrême droite et de l’homme raisonnable ! »
Au-delà de cet épisode, les auteurs ont rencontré de nombreux interlocuteurs qui se sont sentis « trahis » par le chef de l’État, principalement l’ancien président socialiste François Hollande. Mais ils n’ont pas eu accès à Emmanuel Macron ou à sa garde. Dans leur enquête, ils mettent en avant les procédures judiciaires qui semblent « enterrées » en lien avec la vente controversée d’Astom à General Electric lorsqu’Emmanuel Macron était ministre de l’Économie (2014-2016). Ils s’interrogent sur la nomination d’Éric Dupond-Moretti à la tête du ministère de la Justice sur fond d’« intérêts communs » de l’ex-président Nicolas Sarkozy et d’Emmanuel Macron.
De leurs enquêtes contre Emmanuel Macron, ils retiennent « un opportuniste habité par son destin, comme le dit Alain Minc » avec « une conception du pouvoir qui discrédite les pouvoirs adverses » et « atomise l’opposition ». Les deux journalistes de l’AFP résument une conception qui accentue le phénomène d’un « pays désorienté » qui « n’a qu’un seul choix, celui de l’extrême droite et de l’homme raisonnable ». Selon eux, il y a des Pro-Macron, comme Benjamin Griveaux, convaincus que cette stratégie » est extrêmement brillante, car les électeurs choisissent toujours le raisonnable ». « Et puis vous avez tous les autres, qui sont nombreux, qui nous disent : mais c’est super dangereux », car « quand les gens en ont marre de vous, c’est le chaos ».