La France, le pays de l’insécurité et de la violence

Francoise Riviere
9 Min Read

La France s’enfonce de plus en plus dans l’insécurité et la violence, ainsi que le révèlent des statistiques. Le ministère français de l’Intérieur, via un service statistique ministériel de la sécurité intérieure qui lui est rattaché, a rendu public un échantillon des chiffres annuels de la délinquance, de l’insécurité et de la violence pour 2023. Même si cette note de conjoncture ne regroupe qu’une partie des chiffres, elle permet déjà de se faire un avis général. L’année 2023 marque une nouvelle étape dans l’ensauvagement.

On y découvre que la quasi-totalité des indicateurs est au rouge, les coups et blessures volontaires atteignant le record de 362.000 faits l’an passé. Près de 1000 agressions par jour en moyenne. La note ne regroupe évidemment que les actes signalés à la police et transmis à la justice, sachant que toutes les victimes ne portent pas plainte. Sur un an, ces chiffres sont en hausse de 6%. Depuis 2017 et l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir, ils ont augmenté de 63%.

La plus grosse hausse (7%), concerne les violences sexuelles dont 87.000 faits ont été recensés soit environ 240 faits par jour. Les homicides eux aussi sont en hausse (6%), avec 1.033 faits recensés en 2023.

Ces faits trahissent la violence au fil des jours: attaques de rue, rixes à l’école, mauvais gestes dans le cadre familial. Ils renseignent sur un climat qui se dégrade.

Ce triste bilan pour Gérald Darmanin qui arrive en plein remaniement ministériel, pourrait possiblement peser dans sa reconduite ou non au ministère de l’Intérieur.

La France sous le signe de l’ensauvagement

C’est une étude ambitieuse qui entend mesurer le plus fidèlement possible la réalité de l’insécurité en France. Le service statistique du ministère de l’Intérieur a publié jeudi son étude « Vécu et ressenti en matière de sécurité », qui mêle à la fois les chiffres issus des services de police ainsi qu’un sondage auprès des Français pour mesurer ce sentiment d’insécurité.

Ces chiffres traduisent en réalité un phénomène déjà bien avancé, celui de l’ensauvagement, un terme longtemps refusé et aujourd’hui employé par le ministre de l’Intérieur lui-même pour parler des violences de l’été dernier.

D’abord, dans l’ensemble, 18% des Français déclarent se sentir en insécurité dans leur quartier ou leur village, avec une grande disparité selon l’endroit où ils habitent. 25% des habitants de l’agglomération parisienne éprouvent ce sentiment d’insécurité, contre 9% en campagne.

Il est également noté des disparités entre les hommes et les femmes. Plus d’une femme sur quatre affirme renoncer à sortir seule de chez elle (27% précisément), contre 7% des hommes. La moitié des Français s’inquiètent d’être cambriolés, révèle l’étude, tandis qu’ils sont 40% à craindre d’être victimes d’une agression physique, et 38% de vol ou de racket.

L’autre enseignement de l’étude du ministère est la marge de progrès énorme qu’il reste encore à faire dans la prise de plaintes. Moins d’une victime sur cinq (5%) porte plainte pour les agressions sexuelles. Ainsi, malgré certaines variables, l’opinion selon laquelle la violence augmente dans la société est unanimement partagée dans tous les pans de la population.

La France numéro un de l’insécurité en Europe

L’explosion de l’insécurité a en réalité eu lieu durant les années 70 et 80, avec une augmentation considérable et incontestable de 500% du taux de crimes et délits par rapport aux années 50. Par la suite, ce taux a fluctué entre 55 et 70 cas pour 10 000 habitants, en se maintenant à un haut niveau. Lorsqu’une baisse de l’insécurité est annoncée, elle relève en général davantage d’une légère fluctuation que d’une baisse significative. Les statistiques confirment au contraire la hausse de l’insécurité. Les chiffres portent sur la période 2016-2018 et sont publiés par Pierre Buigues, chercheur en économie à l’Université de Toulouse :

-12,9 homicides par million d’habitants en France contre 8,7 en Allemagne, 6,3 en Espagne, 4,9 en Italie. Et encore le chiffre de 12.9 est trompeur, puisque la définition française des homicides est moins large que celle de ses voisins : les morts suite à une agression sans intention prouvée de tuer ne sont pas classées dans les homicides.

-150 vols qualifiés pour 100.000 habitants en France contre moins de 50 en Allemagne, en Italie et dans une grande partie du continent

-250 vols de voitures pour 100.000 habitants en France, 3 fois plus qu’en Espagne, en Allemagne et dans le nord de l’Europe

L’insécurité, un enjeu fondamental

En France, la question de l’insécurité est depuis une vingtaine d’années régulièrement au cœur des débats. Ce phénomène est traditionnellement daté de la défaite surprise de Lionel Jospin au soir du 21 avril 2002, laquelle a maintes fois été interprétée de la manière qui suit : l’insécurité était devenue un enjeu électoral, et le candidat socialiste fut incapable de s’y montrer à la hauteur.

Désormais, l’actualité médiatique est marquée de problèmes sécuritaires, du fiasco du Stade de France au harcèlement de rue, en passant par l’insécurité chronique de Mayotte.

À la question de savoir s’ils vivent, ou non, dans une société violente, les sondés de l’enquête Fractures françaises répondent à 89% par l’affirmative. Dans le détail, 24% la trouvent « très violente » et 65% « plutôt violente ». Le véritable nœud du problème de l’insécurité – ou du sentiment d’insécurité – se situe dans la perception de l’évolution de celle-ci. C’est ce point qui doit interpeller les décideurs publics, c’est ce point qui détermine l’échec ou la réussite d’années de politiques publiques sécuritaires.

Une écrasante majorité de la population porte le même discours qu’Emmanuel Macron lorsque, le 26 octobre 2022, à l’occasion de l’émission « L’Événement » sur France 2, il s’était exprimé en ces termes : « Nous avons une société qui est plus violente : sur les réseaux sociaux, dans la rue, dans la manifestation et dans la vie quotidienne. » Le tropisme idéologique à droite des Français sur la question de l’insécurité est d’autant plus palpable si l’on s’intéresse à la question des causes de la violence. Les trois premières causes avancées par les sondés sont des causes identifiées à droite : le laxisme et les dysfonctionnements de la justice (35%), le laxisme d’un certain nombre de parents (31%), l’immigration et le manque d’intégration d’une partie des personnes d’origine étrangère.

Quoi qu’il en soit, le sentiment d’insécurité est un concept qui reflète l’inquiétude de la population face au crime et à la violence, à l’impossibilité de s’y soustraire mais est aussi lié à la perception que l’individu peut avoir de la manière dont l’Etat le protège face au danger.

Ainsi, la confiance dans l’autorité politique traverse une crise durable depuis plusieurs dizaines d’années. Quelles qu’en soient les raisons, force est de constater que les figures traditionnellement représentatives de l’autorité ne bénéficient plus de la même confiance qu’autrefois, que ce soient les représentants des forces de l’ordre ou les représentants de l’état.

S’agissant de l’insécurité et de la violence qui sévissent en France, si tous les indicateurs ne sont pas systématiquement dans le rouge, le bilan demeure tout de même largement négatif. Peut-être faudrait-il plutôt considérer le ressenti des Français comme légitime, d’autant plus que le niveau d’insatisfaction des citoyens vis-à-vis du niveau d’insécurité et de violence met en lumière la réalité de la société française.

 

 

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