France : les services d’urgence en tension

Francoise Riviere
9 Min Read

Les services d’urgence en tension : comme depuis plusieurs années, les hôpitaux en France traversent une période extrêmement compliquée. Alors que les vacances d’été touchent à leur fin, gouvernement sortant et syndicats de praticiens partagent un même constat sur les urgences durant cette période traditionnellement compliquée : celui d’une tension persistante.

De nombreux services d’urgences sont contraints de fermer temporairement cet été, en raison d’un manque de professionnels et d’un surcroît d’activité. Sur les 650 services d’urgence en France, une cinquantaine est en tension, pointe le ministre délégué de la Santé démissionnaire, Frédéric Valletoux, sans pour autant préciser combien d’établissements avaient dû fermer totalement ou partiellement.

La récente alerte sur le risque de diffusion de la variole du singe en France a de nouveau mis en lumière un édifice sanitaire fragile, avec des services d’urgence en tension, la suppression de 1 500 postes d’internes et des décès qui auraient pu être évités dans des hôpitaux surchargés.

Les appels à la grève et des journées de mobilisation se multiplient, alors que les syndicats pointent la responsable du gouvernement dans la crise des urgences.

Un système de santé en crise, les urgences à bout de souffle

Les mêmes scènes se répètent inlassablement dans les services d’urgence en France. Temps d’attente à rallonge, mesures de régulation, voire fermeture pure et simple pour certains, comme chaque été, le constat est le même : les services d’urgence en tension.

Les représentants du personnel affirment que quatre patients sont morts en quelques semaines en raison du délai d’attente trop long aux urgences.

Depuis l’annonce de la propagation du mpox, ou variole du singe, les médias français se font largement l’écho de l’état inquiétant des services de santé. De nombreux services d’urgences sont contraints de fermer temporairement cet été en raison d’un manque de professionnels et d’un surcroît d’activité.

Éprouvé par le manque d’effectifs et de moyens, l’hôpital public français l’est aussi pour son état de délabrement. À Marseille par exemple, des punaises de lit ont été retrouvées dans l’Hôpital nord, au service d’accueil des urgences, le 20 août. Là encore, ce sont les syndicats qui ont tiré la sonnette d’alarme. La ville avait déjà vu un musée fermer ses portes au début du mois de juillet du fait de la présence de ces nuisibles.

Si depuis le Covid, l’état de santé des urgences en sortie de la pause estivale est scruté à la loupe, le millésime 2024 a pris une coloration particulière avec «l’affaire» des 1.500 postes d’internes en moins dans les hôpitaux à la rentrée. Plutôt que d’essuyer les plâtres de la réforme de leur examen, un grand nombre d’étudiants ont préféré redoubler leur 6e année : 7 % contre 3 % habituellement, selon la Conférence des doyens de médecine. Résultat, « seuls » 7.974 postes ont été ouverts par décret, 16 % de moins qu’en 2023.

Moins de place au global et donc moins de place par spécialités, même si le ministère affirme avoir préservé les plus prioritaires comme la pédiatrie ou la psychiatrie, et une affectation qui se fait en fonction de son rang de sortie de l’examen : des étudiants sont montés au créneau pour dénoncer une injustice, sans pour autant être suivis par leurs associations représentatives.

Services d’urgences en tension : un risque de grève?

Les syndicats des médecins de l’hôpital public lancent un appel à la grève. Un mouvement auquel se raccrochent d’autres métiers comme le syndicat des assistants de régulation médicale, qui répondent au téléphone du Samu. Depuis plusieurs semaines, les principaux syndicats hospitaliers ont déjà appelé à une journée d’action nationale.

Les syndicats dénoncent une situation à l’hôpital catastrophique, pire que l’an dernier. Si certains services se trouvent saturés au niveau national, localement certains établissements sont au bord de l’asphyxie. C’est le cas par exemple au centre hospitalier de Digne-les-Bains où le personnel a débuté une grève illimitée ce mardi 20 août. En cause, un manque de médecins en arrêt maladie depuis de longs mois ou d’autres en congé maternité.

« C’est quelque chose qui aurait pu être anticipé et on se retrouve à faire une espèce de tri à l’entrée des urgences, a expliqué Anne-Laure Reynaud, déléguée CGT à l’hôpital.

La situation à l’hôpital de Digne-les-Bains n’est pourtant pas un cas isolé. Celle-ci s’ajoute en effet aux problématiques déjà connues dans les Alpes-de-Haute-Provence où plusieurs établissements subissent des fermetures occasionnelles, comme à Manosque et Sisteron. Selon les syndicats, les problématiques qui ne seraient pas exclusivement cantonnées à un niveau local, requièrent une réponse au niveau national.

Dans un communiqué de presse publié le 21 août, la centrale syndicale évoquait «des services d’urgences au bord de l’effondrement».

Face à cette situation des services d’urgence en tension, une manifestation s’est déroulée le 22 août devant la préfecture de Loire-Atlantique à l’appel de plusieurs centrales syndicales. Elles demandent notamment que des choix politiques soient faits afin de débloquer des fonds pour l’hôpital public.

Crise des urgences : les coupes budgétaires coupables

Plusieurs facteurs expliquent la situation des services d’urgences en tension : le manque d’effectifs en période de vacances est en cause ainsi que les coupes budgétaires. Ainsi, 1 500 postes d’internes hospitaliers ont été supprimés cette année, provoquant la colère des étudiants en médecine. La baisse drastique du nombre d’internes pourrait entraîner une dégradation du niveau de soins due à un manque d’effectif. Ces derniers représentent parfois jusqu’à 40% de l’effectif d’un hôpital.

Le collectif Médecins pour demain dénonce les «mauvaises conditions de travail dans la profession». Une situation qui tourne au drame dans certains établissements. Face au tollé suscité par la réforme, nombre d’étudiants en médecine demandent la réouverture de postes en internat pour la rentrée à venir.

Tandis que le nombre de postes d’internes en médecine est en chute pour la rentrée universitaire de septembre 2024 – accusant une perte de 1 510 places par rapport à l’année dernière –, le ministre de la Santé démissionnaire Frédéric Valletoux nie la responsabilité du gouvernement. Ce dernier avait pourtant été alerté par un groupe de travail transpartisan de l’Assemblée nationale consacré aux « Déserts médicaux» dès le mois d’avril dernier.

L’annonce de la reconduction à l’identique du budget global de l’État pour 2025, dévoilée par le Premier ministre démissionnaire Gabriel Attal, a immédiatement déclenché un tollé. Dans les faits, le Premier ministre démissionnaire a acté le maintien d’un plafond de dépenses à 492 milliards d’euros l’an prochain pour l’ensemble des ministères, ce qui équivaut à 10 milliards d’économies.

La situation du gouvernement est inédite : alors qu’à cette période chaque ministère avait habituellement reçu du Premier ministre sa lettre de cadrage budgétaire, permettant au ministre et à son cabinet de bâtir ses choix pour l’année suivante, rien encore cette année. En cause, la dissolution de l’Assemblée nationale, ayant conduit le gouvernement à démissionner, dans l’attente impatiente de la nomination d’un nouveau Premier ministre, qui composera un nouveau gouvernement.

Pour rappel, les dirigeants de l’UE ont décidé en avril d’une coupe d’un milliard d’euros dans le principal programme de financement européen pour la santé, après avoir choisi de redéployer 10,6 milliards d’euros provenant de différents programmes de l’UE dans le budget 2021-2027 de l’UE pour financer l’aide à l’Ukraine.

Les acteurs de la santé et les députés européens ont rapidement critiqué les coupes budgétaires dans ce domaine. Néanmoins, les députés européens ont donné leur feu vert à la réaffectation des fonds pour l’aide à Kiev lors de la séance plénière du Parlement le 27 février dernier.

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