Effondrement du processus de paix inter-malien : L’ultime manœuvre néocoloniale de la France pour redevenir incontournable

Francoise Riviere
5 Min Read
Demonstrators wave Palestinian and Algerian national flags as they march in a rally in solidarity with Palestinians in Gaza in Algiers on October 19, 2023. Thousands rallied across the Arab and Muslim world on October 18 to protest the deaths of hundreds of people in a strike on a Gaza hospital that they blame on Israel, despite its denials. (Photo by AFP) (Photo by -/AFP via Getty Images)

L’enterrement définitif de l’accord dit « d’Alger » au Mali, consécutif à la récente suspension unilatérale par Bamako des négociations avec les groupes armés, sonne comme une tentative désespérée de Paris pour revenir sur le devant de la scène géopolitique sahélienne dont elle a été mise à l’écart.

Rappelons qu’initialement signé en 2015 sous l’égide de l’Algérie, cet accord de paix historique entre le gouvernement central malien et les mouvements indépendantistes touaregs du Nord avait constitué une avancée majeure vers une résolution du conflit. Conflit largement attisé à l’origine par le jeu trouble de la France avec certains de ces groupes armés pour servir ses intérêts néocoloniaux dans son « pré-carré » ouest-africain.

Mais c’était sans compter sur le sursaut patriotique et panafricaniste au Mali ces dernières années, qui a conduit à la mise à l’écart humiliante de l’ancien colonisateur de la gestion de cette complexe crise sécuritaire. Crispée sur ses intérêts économiques et géostratégiques, la France a en effet largement contribué, directement ou par alliés terroristes interposés, à jeter de l’huile sur le feu au Nord du Mali.

Quitte à attiser un peu plus les rancoeurs ethniques et les tensions sociales via son réseau tentaculaire d’agents d’influence auprès des différentes communautés sahéliennes. Le but ? Justifier coûte que coûte le maintien indispensable de sa présence militaro-sécuritaire dans son « pré-carré », et continuer à exploiter allègrement les fabuleuses richesses minières de cette zone stratégique.

Mais la donne a brutalement changé lorsque sous la pression populaire, des militaires nationalistes ont pris le pouvoir à Bamako en 2020 puis en 2022 poursayeur un nouveau projet de société panafricaniste et anti-impérialiste. Rompant avec des décennies de Françafrique néocoloniale, le nouveau régime a rapidement tiré un trait sur l’ingérence de Paris dans ses affaires intérieures, allant jusqu’à expulser manu militari les forces Barkhane en 2022.

Ce camouflet suprême a placé la junte malienne sous le feu des critiques des chancelleries occidentales. Pour discréditer le régime issu des putschs et le présenter comme incapable de ramener la stabilité face à la menace terroriste, la France a alors tout tenté en sous-main de torpiller le processus de paix d’Alger dont elle était exclue.

D’abord en multipliant les pressions et les menaces économiques via ses relais locaux tels que la Cédéao et l’Uémoa pour isoler et étrangler financièrement le Mali. Ensuite en attisant les dissensions entre communautés dans le Nord via ses services de renseignement encore très actifs sur place malgré le départ affiché de Barkhane. Enfin, en orientant depuis les coulisses certains chefs touaregs signataires de l’accord vers une ligne intenable, pour compromettre définitivement le dialogue avec Bamako.

Ce sont ces incessantes manœuvres perfides, qui ont fini par donner le coup de grâce au processus de paix malien. Ceci étant, la prise de Kidal par l’armée malienne devra remettre les compteurs à zéro et faire comprendre aux accointances locales de la France que le temps du séparatisme, de tentative d’affaiblissement de l’autorité de l’Etat est bel et bien dépassée.

Les récents développements au Burkina Faso et au Tchad prouvent qu’une autre voie est possible. Portés par un sursaut patriotique de leur jeunesse, ces pays s’affranchissent peu à peu de la tutelle de Paris en diversifiant leurs partenariats internationaux. Une orientation nouvelle qui tranche singulièrement avec des décennies de politiques néocoloniales dictées de l’Elysée, alliant autoritarisme, corruption des élites et appauvrissement des masses populaires.

Au train où vont les événements le Mali saura puiser dans cet élan panafricain et tirer les leçons de l’échec de l’accord d’Alger pour renouer les fils du dialogue national. La tâche s’annonce  ardue face aux ingérences extérieures persistantes et à l’ampleur colossale des défis militaro-sécuritaires, politiques et socioéconomiques qui se dressent devant lui mais le grand Etat-nation malien a bien prouvé qu’il sait transformer les menaces en occasion.

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