« J’ai engagé la procédure de dissolution de ce groupement de fait que sont les Zouaves qui est un groupement de personnes qui viennent soit du GUD – Groupe union défense – (ancien syndicat étudiant d’extrême droite), soit de l’Action française, c’est-à-dire des mouvements d’ultra-droite connus », a déclaré ce dimanche le ministre de l’Intérieur au Grand Jury. “Si le contradictoire nous donne raison, en tout cas si nous pensons que nous avons raison, nous dissoudrons ce groupement de fait en Conseil des ministres et le Conseil d’État, encore une fois je l’espère, nous donnera raison”, a-t-il poursuivi, rappelant l’avoir déjà fait « pour Génération identitaire ». Le ministre de l’Intérieur a également rappelé les dissolutions prononcées à l’encontre de « petits groupes islamistes », citant le CCIF – Collectif contre l’islamophobie en France -, BarakyCity et le collectif Cheikh Yassine, dans le sillage de l’assassinat de Samuel Paty en octobre 2020.
Le 5 décembre, lors du premier meeting de campagne du candidat Éric Zemmour à Villepinte, plusieurs militants de SOS Racisme, qui avaient exhibé des tee-shirts « Non au racisme », ont été attaqués à coups de poing et de chaises à lancer par des soutiens du polémiste. Une cinquantaine de personnes, identifiées par la police comme appartenant aux Zouaves, ont pris la pose à la fin du meeting pour une photo, en scandant « On est chez nous », selon un journaliste de l’AFP. “L’un des assaillants est une personne qui est membre des Zouaves de Paris (…). Une personne de la sphère militante l’a reconnu”, a déclaré à l’AFP Dominique Sopo, président de SOS Racisme.
Arrestation du membre des Zouaves par la BRI
Une enquête a été ouverte et confiée à la sûreté territoriale après les violences survenues lors du meeting du candidat à Villepinte (Seine-Saint-Denis). Marc de Caqueray-Valmenier, le chef du groupe d’extrême droite soupçonné d’avoir participé aux violences, a été arrêté mardi. La Brigade de recherche et d’intervention (BRI) a interpellé le leader des Zouaves de Paris, groupe d’extrême droite, à la suite des violences commises lors du premier meeting d’Éric Zemmour à Villepinte, a appris BFMTV de source policière, confirmant une information de France 3 Ile-de-France.
Les policiers l’ont interpellé non loin de son domicile à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine) sur la voie publique en début d’après-midi. Ils n’ont pas exclu qu’il puisse quitter le territoire français. Plusieurs médias ont identifié Marc Cacqueray de Valmeunier sur des vidéos montrant l’agression à coups de poings et de chaises de militants de SOS Racisme qui avaient exhibé des t-shirts « Non au racisme » lors du premier rassemblement de campagne de la polémique. Ces images, ainsi que celle de la vidéosurveillance, ont permis aux enquêteurs de remonter sa trace.
Le jeune homme de 23 ans, qui conteste régulièrement le titre de leader du groupuscule, né en 2018, a déjà été condamné à six mois de prison avec sursis en janvier 2019 pour des violences commises lors des manifestations des « gilets jaunes » le 1er décembre 2018. Dix mois de prison ont également été requis contre lui il y a un mois lors du procès de l’attaque à la batte de baseball d’un bar antifa à Paris, dans le quartier de Ménilmontant, en juin 2020.
Darmanin : « Si le contradictoire nous donne raison, nous dissoudrons ce groupement »
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé dimanche dernier avoir engagé la procédure de dissolution du groupuscule. “Nous avons engagé cette procédure, il y aura un contradictoire comme à chaque fois que j’ai fait ça, je l’ai fait pour Génération identitaire”, a rappelé le locataire de Beauvau Gérald Darmanin. “Si le contradictoire nous donne raison, en tout cas si nous pensons que nous avons raison, nous dissoudrons ce groupement de fait en Conseil des ministres et le Conseil d’État, encore une fois je l’espère, nous donnera raison”, a-t-il poursuivi.
Suite aux violences qui ont émaillé le meeting à Villepinte de l’essayiste et candidat à la présidentielle Éric Zemmour, Gérald Darmanin a annoncé sur le plateau du Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro, que ses services avaient engagé une procédure de dissolution à l’encontre de ce groupe. Le ministre a justifié cette décision en rappelant que les Zouaves sont « un groupe de personnes qui viennent soit du GUD, soit de l’Action française, c’est-à-dire de mouvements d’ultra-droite connus ». Seon le politologue, Jean-Yves Camus : « On ne peut pas dissoudre un groupe pour la simple raison que certains de ses membres viennent d’un autre groupe comme le GUD ou l’Action française qui n’ont pas ailleurs, l’un comme l’autre, été dissous ».
La loi, selon l’article 212-1 du code de la sécurité intérieure, prévoit plusieurs critères précis pour dissoudre une association ou un « groupement de fait » (qui n’a pas de statut). Pour le politologue, la direction des libertés publiques pourrait se baser, dans la rédaction du décret, sur les deux premiers critères énoncés par la loi : le fait que le groupe puisse provoquer « à des manifestations armées ou à des actes violents contre les personnes ou les biens » ou qu’il présente « par sa forme et son organisation militaire, le caractère de groupes de combat ou de milices privées ». Les Zouaves sont pour leur part un « groupement de fait » et non une association. Car elle n’a pas été déclarée en préfecture. “On peut faire le rapprochement avec un groupe armé”, estime le politologue. “Ce sont des gens qui n’agissent que par la violence, il n’y a rien d’autre”. “Ce n’est pas un groupe qui pense ou qui produit”, Contrairement à l’Action française, par exemple, qui publie son journal et se construit sur une culture politique et des références idéologiques. “Nous n’avons pas d’interactions avec eux, ils n’ont pas d’idées politiques”, Confirme un membre de l’AF.
Les zouaves étaient à l’origine une classe d’infanterie légère de l’armée française entre 1830 et 1962, composée essentiellement de recrues coloniales nord-africaines, principalement des Algériens. Les zouaves ont ensuite été regroupés en régiments composés exclusivement de soldats français qui ont combattu en Crimée, en Italie pendant les deux guerres mondiales, en Indochine et en Algérie, avant d’être dissous en 1962. En argot français, « être zouave » signifie faire l’idiot. Les Zouaves sont soupçonnés d’être à l’origine de plusieurs agressions violentes ces dernières années, notamment des attaques contre des supporters de football brandissant des drapeaux algériens à Paris pendant la Coupe du monde 2018 organisée en Russie et contre un journaliste de radio lors d’une manifestation l’an dernier. Ils ont également été liés à des violences lors de manifestations des Gilets Jaunes. Composé presque exclusivement d’hommes âgés de 20 à 30 ans, Zouaves n’aurait pas de structure formelle mais gravite autour d’une douzaine de membres qui se réunissent pour mener des actions de type « hit-and-run ».
Le mois dernier, cinq membres de Zouaves ont comparu devant un tribunal après l’attaque d’un bar parisien connu pour être fréquenté par des antifascistes, où les buveurs ont été attaqués avec des battes de baseball et des gaz lacrymogènes. Le procureur de la République a ouvert une enquête sur les violences commises lors du meeting de Zemmour. Dominique Sopo, le président de SOS Racisme, a déclaré à la radio Franceinfo : « Il faut soit être ivre de racisme, soit être certain de sa toute-puissance pour pouvoir agir comme ça devant les caméras. C’est absolument ahurissant et ça montre ce qu’est ce candidat et le public qu’il attire et qui sont les militants qui se sont rassemblés là. »