Selon de nombreux observateurs politiques, les récentes manifestations teintées de violences en France font écho à une impasse politique et sociale, elle-même résultat d’une crise de gouvernance. Suite à la mort de Nahel Merzoukq, un jeune franco-marocain-algérien de 17 ans, dans l’une des banlieues ouest de Paris, tué par la police derrière un feu de signalisation, des vagues sans précédent de manifestations ont été lancées à Paris et dans d’autres villes françaises, principalement dirigées contre la violence policière et la discrimination envers les personnes de couleur et la minorité musulmane. Depuis le début des manifestations de rue le 27 juin, plus de 4.000 personnes pour la plupart des adolescents ont été arrêtés et détenus à Paris et dans d’autres villes françaises, bilan jamais atteint auparavant. En effet en 2005, 2009 et 2017, des manifestations de grande ampleur avaient eu lieu en réponse à la brutalité policière et au meurtre d’immigrants africains par la police mais jamais les protestataires n’en etaient venus à s’attaquer aux postes de la police pour s’armer ni les policiers, a ouvrir si gratuitement le feu sur les manifestants. La différence a ainsi été criante avec le mouvement des gilets jaunes, qui protestait contre la situation sociale, les prix élevés et les politiques néolibérales, ou avec le mouvement de protestation contre les réformes de retraite ou de travail qui ont secoué dans le temps la France pendant des semaines et des mois.
Mais le récent mouvement s’est aussi distingué par la réaction de la plus haute autorité de l’Etat. En réponse aux manifestations, le président français Emmanuel Macron a annoncé qu’il prévoyait de supprimer l’aide financière aux familles des adolescents participant aux protestations. Peu de commentaires ont accompagné cette terrible proposition saluée par ailleurs par les partis d’extrême droite. Et pourtant il y a eu trop à dire là dessous. Le soir du lundi 3 juillet, Macron a annoncé lors de sa visite aux forces de police françaises : “Nous devons sanctionner financièrement les familles dès la première infraction”. Ce que le président a preconisé, ressemble à plus d’un égard à la politique dite de “punition collective” que pratiquerait par exemple Israël contre les Palestiniens et qui équivaut à discriminer davantage les victimes mêmes de la discrimination. Fabien Roussel, secrétaire général du Parti communiste français, a bien senti cette dérive et a déclaré dans une interview aux médias français : “Si vous supprimez les subventions et l’aide sociale, vous ajouterez une autre tragédie à la souffrance du peuple”. Le maire de l’une des banlieues les plus pauvres de Paris a également mis en garde contre le fait que Macron “jette de l’huile sur le feu” avec ces déclarations. Ce que Macron et les partis d’extrême droite ne comprennent pas, c’est que ces manifestations sont une explosion de colère parmi les habitants des quartiers populaires qui en ont assez des inégalités sociales et de la discrimination et que le fait de vouloir leur clouer le bec en les accablant des mesures discriminatoires ne ferait qu’attiser la crise et exposer davantage la paix sociale. Souvent, une grande partie des manifestants sont des jeunes, voire très jeunes, qui ne voient aucun avenir social clair devant eux. Qu’on vienne infliger à leur famille des sanctions parce qu’ils ont osé, eux, exprimer leur ras-le-bol cela ne peut que faire installer plus durablement ces adolescents dans une attitude de défi. Evidemment l’Etat français et son chef, Macron sont conscients des risques qu’une telle attitude fait encourir à la sécurité collective mais s’ils choisissent la punition collective pour faire taire les protestations c’est sans doute parce qu’ils sont à court de moyens et c’est que se pose la question suivante: le système politique en France tel que défini par la Ve République est-il dans l’impasse?
Cependant, on ne peut pas affirmer avec certitude qu’il existe un lien institutionnel entre cette vague de manifestations civiles et d’autres manifestations. Il y a probablement des liens entre les manifestations des gilets jaunes et une partie du mouvement populaire français protestant contre les changements des conditions de retraite, notamment dans les petites et moyennes villes. Mais les adolescents qui sont descendus dans les rues ces derniers jours n’avaient participé à aucune des deux manifestations mentionnées précédemment. Ce qui pourrait signifier ceci : il existe un lien institutionnel entre les politiques qui ont alimenté ces manifestations, les politiques néolibérales capitalistes se trouvant dans limpasse puisqu’ayant détruit les services publics dans les quartiers populaires – et la perspective d’un avenir prometteur pour leurs habitants.
Cette impasse du système politique est d’autant plus perceptible qu’aucun médias français n’a eu le courage ni sans doute l’autorisation de l’évoquer et n’a fait aucune référence à la crise de gouvernance qui sous-tend la grogne des Français accusant à tort “la faiblesse des politiques municipales”, alors même que cette faiblesse est un corollaire des mesures entreprises par le gouvernement Macron depuis 2017. En France la crise de gouvernance est vecue ainsi : une partie de la société française ne comprend plus ce à quoi l’autre partie de la population du pays est confrontée. C’est pourquoi des explications et interprétations superficielles et incorrectes deviennent courantes, et les médias d’État les exploitent facilement à leur avantage.
Selon de nombreux experts politiques, la gravité de la crise en France a atteint un point sensible. Comme nous l’avons vu dans le cas du mouvement des retraites et des gilets jaunes, le gouvernement traite ces manifestations avec force et arbitraire bien différemment du traitement qu’il réservait par exemple en 2005 ou en 2008 aux manifestations civiles. L’Etat francais ligoté par un systeme politique qui a atteint ses limites, donne desormais limpression de se retourner contre ses propres piliers: legalité la fraternité la liberté soit des slogans sur quoi s’est fondée la Republique devient impossible dans le cadre du systeme liberal à respecter quitte à pousser les dirigeants politiques à trahir les idéaux et aspirations dont la France s’est depuis toujours affirmé être le modèle.
Dans ce cadre, le bipartisme politique ttraditionnel en France n’est qu’une arme au service de de davantage de discrimination, de divisions au sein de la société. Alors que l’extrême droite et de plus en plus la droite tente de se positionner de manière à pouvoir tirer profit de cette situation critique et que ses forces alimentent le nationalisme ethnique et cherchent une justification à leurs théories dangereuses dans les événements du pays, la gauche, elle, se cachant derrière de beaux slogans comme l’emploi et l’avenir du travail, l’égalité des chances pour tous les citoyens, la reconstruction des services publics, la critique de la domination du capital sur tous les aspects de la vie, et la préservation et le développement des fondements de la République basés sur les nouveaux droits des citoyens et des travailleurs ne fait que nourrir de fausses illusions et cacher aux yeux des Français la vraie racine du mal à savoir un système politique économique sociale profondément disparitaire qui n’à rien moins d’un esclavagisme cachés sous les dehors trompeurs de la modernité.
Mais les Français réputés être des “révolutionnaires” se laissent de moins en moins bernés. Le tout dernier sursaut dont ils ont fait preuve prouve qu’il s’impatiente pour en finir avec un système de gouvernance qui a un horizon complètement bouché, de l’Europe aux Etats-Unis
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