Crimes de guerre américains en Irak

Francoise Riviere
11 Min Read
US marines from the 2nd platoon, Weapons Company, 2nd Battalion, 6th Marine Regiment search an Iraqi in the restive city of Fallujah, 50 kilometers (30 miles) west of Baghdad, 12 May 2007. Five US-led soldiers were killed on today and three reported missing after an attack south of Baghdad, the US military announced, following earlier reports that three troops had been captured. Eight soldiers were attacked 12 miles west of Mahmudiyah lies 30 kilometres (20 miles) south of Baghdad, in an area known for a strong insurgent presence and nicknamed the "triangle of death". AFP PHOTO / PAUL SCHEMM

Les crimes de guerre américains en Irak s’inscrivent dans le cadre des violations des lois et coutumes de la guerre commises par les forces armées des États-Unis et ce, depuis la signature des Conventions de La Haye de 1899 et 1907. Celles-ci incluent l’exécution sommaire de prisonniers, le mauvais traitement des prisonniers au cours des interrogatoires, la pratique de la torture et l’utilisation de la violence contre les civils non-combattants.

Le 20 mars 2003, une coalition menée par les États-Unis et des pays alliés comme le Royaume-Uni et l’Espagne entame l’invasion de l’Irak au mépris de toutes les lois et règles internationales.

Tout au long de la guerre d’Irak, des crimes de guerre commis par des soldats américains sont signalés. Les plus notables  les plus révoltants sont le massacre de Mahmoudiyah et le massacre de Haditha.

Des photos récemment publiées ont, pour la première fois, exposé les sombres réalités des meurtres de 24 hommes, femmes et enfants irakiens commis il y a près de deux décennies par des Marines américains.

Le 11 août 2014, un rapport de l’ONG Amnesty international confirme de façon accablante que les forces américaines ont tué des milliers de civils irakiens sans être poursuivies ni avoir été condamné à verser des compensations aux familles meurtries.

Irak : le spectre omniprésent des crimes de guerre américains

Le 19 novembre 2005, des Marines américains se sont livrés à une tuerie dans la ville irakienne de Haditha dans la province d’Al-Anbar. Le massacre de 2005, qui a eu lieu après l’explosion d’une bombe au bord d’une route contre un convoi de Marines, a coûté la vie aux 24 Irakiens, dont des femmes, des enfants et un homme en fauteuil roulant.

Au nombre des victimes figuraient aussi une fillette de trois ans ainsi qu’ un vieillard de 76 ans, la plupart d’entre eux ayant été abattus d’une balle dans la tête à bout portant.

Une fois le massacre terminé, deux autres Marines sont partis documenter les conséquences. Le massacre est devenu connu sous le nom de massacre de Haditha. Le magazine américain The New Yorker, après des années de batailles juridiques, a finalement obtenu et publié ces photographies choquantes, avec le consentement des familles des victimes.

Les images dépeignent de manière crue les conséquences des massacres, rappelant de manière obsédante le type de crimes de guerre américains en Irak et les efforts de l’armée américaine pour dissimuler la vérité.

Malgré la gravité de l’incident, les accusations initiales de meurtre contre quatre Marines ont été abandonnées et le général James Mattis, futur secrétaire à la Défense, a félicité l’un des Marines impliqués dans la tuerie et l’a éhontément déclaré innocent.

Les personnes qui ont suivi l’affaire disent qu’elle a échoué en grande partie à cause des erreurs des procureurs – notamment l’octroi de l’immunité à des membres de l’escouade dont la crédibilité en tant que témoins a été remise en question, et des décisions tactiques qui ont conduit à un long retard avant le début du procès.

En 2012, la dernière affaire s’est conclue par un accord de plaidoyer, permettant aux couopables d’échapper à la prison.

La guerre contre l’Irak, le crime originel de l’intervention unilatérale

Le 20 mars 2003, les États-Unis et le Royaume-Uni ont violé toutes les règles internationales et attaqué l’Irak. Ils ont envahi illégalement ce pays, tué des centaines de milliers d’Irakiens, détruit les infrastructures et plongé une région entière dans le chaos et le sang. Le résultat fut, entre autres, la naissance du groupe terroriste Daech. Aujourd’hui encore, les séquelles des crimes de guerre américains en Irak se font sentir sur le plan politique et social.

Pourquoi parler de l’Irak alors que tous les yeux sont rivés sur l’Ukraine ? Parce que la guerre contre l’Irak est le crime originel, celui qui a entaché la probité de l’ordre international et légitimé une doctrine mortifère : l’intervention unilatérale et la violence militaire pour assurer ses intérêts géopolitiques. Par leur action, les Américains et les Britanniques ont envoyé un message sans équivoque au monde : lorsqu’on est puissant, on est intouchable, et lorsqu’on est intouchable, on peut faire ce qu’on veut sans crainte d’avoir à en rendre compte.

Américains et Britanniques ayant déjà décidé de faire la guerre, ceux-ci ont pris un soin particulier pour discréditer le processus d’inspection en publiant de fausses informations sur les armes de destruction massive tout en se livrant à une campagne de fortes pressions afin de convaincre les membres non permanents du Conseil de se joindre à leur camp. Les inspecteurs ont tenu bon et ont confirmé n’avoir rien trouvé, et la majorité du Conseil a rejoint le camp du désarmement par des moyens pacifiques.

La manœuvre américano-britannique ayant échoué, Londres et Washington ont versé dans l’illégalité et ont déclenché la guerre, appuyés par les pays d’Europe de l’Est, ceux-là mêmes qui aujourd’hui condamnent l’invasion de l’Ukraine.

Au cours de l’occupation de l’Irak par les États-Unis, de 2003 à 2011, les autorités ont placé en détention des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants à la prison d’Abou Ghraib. Un rapport de février 2004 rédigé par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à l’attention de la coalition militaire menée par les États-Unis mentionnait que des agents des renseignements militaires avaient déclaré au CICR que 70 à 90 % des personnes détenues par la coalition en 2003 en Irak avaient été arrêtées par erreur.

Quelle que soit l’opinion que l’on se faisait du régime en place à l’époque  en Irak, la guerre a violé toutes les règles internationales. En s’affranchissant du droit, les deux puissances anglo-saxonnes ont légitimé l’intervention unilatérale, un geste qui ne pouvait passer inaperçu au sein de la communauté internationale.

20 ans après l’invasion de l’Irak par les États-Unis, l’impunité règne en maître

Plus de 20 ans après l’invasion suivie de l’occupation de l’Irak, Les organisations de défense des droits de l’homme renouvellent leur appel en faveur de la justice et de réparations pleines et entières pour les atteintes flagrantes aux droits humains et les violations graves du droit international humanitaire perpétrées par la coalition dirigée par les États-Unis.

Entre 2003 et 2011, Amnesty International a recueilli des informations sur les crimes de guerre américains en Irak et l’implication des forces américaines dans des violations endémiques, notamment des attaques menées sans discrimination qui ont tué et blessé des civils, des détentions secrètes, des transferts secrets de détenus, des disparitions forcées, la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. D’anciens prisonniers ont dénoncé de manière crédible toute une série d’atteintes aux droits humains dans les centres de détention, notamment la privation de sommeil, la nudité forcée, la privation de nourriture et d’eau adéquates, les simulacres d’exécutions et les menaces de viol.

Depuis 20 ans, l’impunité règne en maître et l’obligation de rendre des comptes pour les crimes de guerre américains en Irak et les violations des droits humains commises en Irak reste insaisissable. Les États-Unis n’ont pas dûment enquêté sur les violations généralisées et les crimes de guerre commis par les forces américaines et n’ont pas amené les responsables à rendre des comptes à tous les niveaux, y compris les hauts représentants et les commandants américains. Les victimes de violations flagrantes des droits humains, notamment le massacre de Haditha et des actes de torture et de mauvais traitements à Abou Ghraib, ont été pour la grande majorité privés de leur droit à la justice et à des réparations. Les victimes irakiennes ayant tenté d’obtenir réparation pour des violations imputables aux États-Unis devant les tribunaux américains se sont heurtées à des obstacles systématiques.

Depuis quelques semaines, des voix en Occident demandent à ce que les dirigeants russes soient déférés devant une cour de justice pour répondre de leurs actes en Ukraine, dont celui d’agression. Qu’est-ce qui les empêche de réclamer un élargissement du mandat aux crimes commis en Irak ? Ou de créer une instance indépendante pour le faire ?

Le monde étant ce qu’il est, cela ne se fera pas. L’Occident ne sera pas favorable à ce que soit inséré dans le mandat d’un tribunal le crime d’agression pour juger l’offensive US en Irak ou en Afghanistan. En effet, il y a longtemps que les Occidentaux ont trouvé les moyens de se dédouaner de leurs crimes en abusent des mécanismes juridiques et en déployant leurs forces économiques et militaires pour intimider ceux qui auraient la mauvaise idée de rappeler qu’aucun État n’est au-dessus des lois.

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