Assassinat du chef du Hamas à Téhéran : acte suicidaire d’Israël

Francoise Riviere
11 Min Read
Mandatory Credit: Photo by ABEDIN TAHERKENAREH/EPA-EFE/Shutterstock (14612677b) Iranians carry the portrait of late Hamas political leader Ismail Haniyeh and wave Palestinian flags during a protest at Tehran University in Tehran, Iran, 31 July 2024. According to an Iranian Revolutionary Guard Corps (IRGC) statement on 31 July, Hamas political leader Ismail Haniyeh and one of his bodyguards were targeted and killed in Tehran on 31 July 2024. Iranians protest following Hamas political leader Haniyeh's killing in Tehran, Iran Islamic Republic Of - 01 Jul 2024

Le chef du bureau politique du mouvement de Résistance palestinien Hamas, Ismaïl Haniyeh, est tombé en martyr à Téhéran, a rapporté mercredi l’Agence de presse palestinienne Wafa, citant un communiqué du mouvement.

«Notre frère, Ismaïl Haniyeh, le chef du mouvement, est mort dans une attaque contre sa résidence à Téhéran après sa participation à l’investiture du nouveau président iranien Massoud Pezeshkian », a écrit dans un communiqué le Hamas.

Le Corps des gardiens de la Révolution islamique, CGRI, ont confirmé que la résidence de Haniyeh avait été «touchée» à Téhéran et que «lui et l’un de ses gardes du corps» étaient «tombés en martyrs». Moussa Abou Marzouk, un responsable du bureau politique du Hamas, a dénoncé dans un communiqué un «acte lâche, qui ne restera pas sans réponse ».

Depuis l’annonce de la mort d’Ismaïl Haniyeh, les réactions affluent. L’Iran a promis un châtiment sévère qui fera regretter l’ennemi et à l’international,  différents pays ont mis en garde contre une «escalade dangereuse» des tensions dans la région.

Qui était Ismaïl Haniyeh, tué dans une frappe israélienne dans la nuit de mardi à mercredi?

Ismaïl Haniyeh est né dans un camp de réfugiés près de la ville de Gaza en 1962 et a rejoint le Hamas à la fin des années 1980 pendant la première Intifada.

Il est diplômé en 1987 de l’Université islamique après avoir obtenu une licence en littérature arabe, puis a obtenu un doctorat de l’Université islamique en 2009. Ismail Haniyeh a commencé son activité au sein du « Bloc islamique », dans la bande de Gaza, et de là est né le Mouvement de résistance islamique, le Hamas.

Il a travaillé comme membre du Conseil étudiant de l’Université islamique de Gaza entre 1983 et 1984. L’année suivante, il a été désigné comme président du Conseil estudiantin. Il a été arrêté par les autorités d’occupation israéliennes en 1989 pendant 3 ans, après quoi il a été exilé à Marj al-Zouhur, à la frontière libano-palestinienne, avec un groupe de dirigeants du Hamas.

Il est retourné à Gaza après avoir passé un an en exil et y a été nommé doyen de l’Université islamique.

En 1997, il a été nommé chef de bureau du fondateur du Hamas, Cheikh Ahmed Yassin, après sa libération. En 2004, il a été élu chef du mouvement Hamas dans la bande de Gaza, suite au martyre du Dr Abdel Aziz al-Rantissi.

L’homme de 62 ans a été Premier ministre de l’Autorité palestinienne entre 2006 et 2007, après que le Hamas a remporté la majorité des sièges aux élections législatives palestiniennes de l’époque.

Après la mise en place d’une administration dirigée par le Hamas dans la bande de Gaza, Haniyeh a été le chef du gouvernement de facto à Gaza de 2007 à 2014.

En 2017, il a été choisi pour remplacer Khaled Mechaal au poste de chef du bureau politique du Hamas. Avant son assassinat dans un raid contre sa résidence à Téhéran, il est venu assister à la prestation de serment du nouveau président iranien Massoud Pezeshkian devant le Parlement.

Assassinats d’Ismaïl Haniyeh à Téhéran: les condamnations pleuvent contre Israël

L’assassinat d’Ismaël Haniyeh dans la capitale iranienne a été condamné par les composantes de «l’axe de la Résistance» et par plusieurs pays dont la Turquie, le Qatar et la Syrie. Le Hamas promet que cet acte «ne restera pas sans réponse».

Le leader de la Révolution islamique l’Ayatollah Ali Khamenei a affirmé que «l’entité sioniste criminelle et terroriste s’est attirée la punition la plus sévère à la suite de cette agression ».

Et de renchérir: « Il est du devoir de l’Iran de venger le sang de Haniyeh parce qu’il est tombé en martyre sur notre sol ».

Le Hamas a vivement réagi en condamnant l’assassinat et en promettant que cet acte «ne restera pas sans réponse». De son côté, le Hezbollah a rendu hommage dans un communiqué à Ismaïl Haniyeh, présentant ses condoléances «au peuple palestinien». Haniyeh «faisait partie des grands dirigeants de la Résistance de notre époque, qui ont affronté avec courage le projet d’hégémonie américaine et l’occupation sioniste», a ajouté le Hezbollah, estimant que son «martyr renforcera la détermination» de l’axe.

Le dirigeant du mouvement du Jihad islamique, Ziad al-Nakhala, également à Téhéran pour l’investiture du nouveau président iranien Massoud Pezechkian, a publié un communiqué dans lequel il a déclaré que «l’assassinat coupable perpétré par l’ennemi criminel contre un symbole de la Résistance ne dissuadera pas notre peuple de poursuivre la résistance pour mettre fin au crime sioniste qui a dépassé toutes les limites».

Au Yémen, le mouvement Ansar Allah a également déclaré sur la plateforme X que l’assassinat d’Ismaël Haniyeh était un «crime terroriste odieux».

La Jordanie, le Qatar, la Turquie et la Syrie ont également condamné l’assassinat du chef du bureau politique du Hamas. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a condamné «l’assassinat perfide» de son «frère». «Que Dieu ait pitié de mon frère Ismaïl Haniyeh, tombé en martyr à la suite de cette odieuse attaque», a-t-il écrit sur X, dénonçant «la barbarie sioniste».

La Chine et la Russie ont aussi dénoncé cette frappe. «C’est un assassinat politique tout à fait inacceptable, et cela va aboutir à une nouvelle escalade des tensions», a déclaré l’un des vice-ministres russe des Affaires étrangères, Mikhaïl Bogdanov.

Assassinat de Haniyeh : vers un embrasement régional sur fond de guerre à Gaza

Énième escalade des tensions entre l’entité israélienne et l’axe de la Résistance ces derniers mois, l’assassinat du chef du Hamas, considéré comme un acteur majeur des négociations pour un cessez-le-feu intervient au lendemain d’une frappe meurtrière de l’armée israélienne contre la banlieue de Beyrouth, faisant plusieurs morts dont des civils.

Selon les observateurs, l’assassinat du chef du Hamas pourrait avoir un impact grave sur les négociations de cessez-le-feu à Gaza. Le Qatar, interlocuteur clé du mouvement palestinien dans les négociations de paix, a d’ailleurs partagé ses interrogations sur l’avenir des négociations pour une trêve à Gaza.

En outre, Firas Maksad, chercheur et directeur de la sensibilisation stratégique pour le Middle East Institute affirme que l’éventualité d’une « campagne orchestrée à l’échelle régionale amènerait les différentes composantes de l’axe de la Résistance en Irak, au Yémen, au Liban dans une réponse directe à Israël ». Il ajoute que «nous allons connaître plusieurs jours sombres au cours desquels la région sera au bord d’une guerre totale ».

De nombreuses réactions à l’assassinat du leader du Hamas permettent déjà d’entrevoir le risque d’une réponse sans précédent du Hamas et /ou de ses alliés.

Alors qu’Israël se refuse toujours à communiquer sur la mort d’Ismaïl Haniyeh, plusieurs pays ont immédiatement mis en garde contre un nouveau risque d’«escalade dangereuse » du conflit. C’est le cas de la Syrie, qui ne voit rien d’autre qu’un facteur d’embrassement « de toute la région ».

De toute façon, cet acte terroriste constitue non seulement une violation flagrante des principes et règles du droit international et de la Charte des Nations Unies, mais également une menace sérieuse à la paix et à la sécurité régionales et internationales.

Erreur de calcul du tandem américano-israélien

L’assassinat d’Ismail Haniyeh a montré que la politique d’Israël depuis sa création a toujours consisté à massacrer les populations innocentes et  mener des assassinats ciblés contre les dirigeants de la Résistance.

Israël, de ses propres aveux, sait qu’il ne peut pas vaincre la Résistance islamique lors des confrontations directes. Par conséquent, chaque fois qu’il se trouve coincé dans une situation suffocante, il se livre à des assassinats contre les personnes dont la liquidation pourrait, à sa guise, le sauver pour un moment.

Or, jusqu’à présent, le sang de toute personne tombée en martyr, en particulier les Palestiniens, a renforcé davantage la détermination de cette nation résistante.

Pour rappel, entre 2005 et 2023, Haniyeh et ses amis ont fait preuve d’une telle résistance dans 12 guerres différentes que les Israéliens ont été contraints, par l’intermédiaire de plusieurs acteurs, de supplier un cessez-le-feu.

En outre, Haniyeh a été l’une des figures emblématiques de la Résistance palestinienne à avoir contribué à la fin du mythe d’invincibilité de l’armée israélienne et asséné un coup dur aux services de renseignement israéliens.

L’assassinat du martyr Ismail Haniyeh à Téhéran est un pari dangereux par lequel Israël a franchi plusieurs lignes rouges et devra donc s’attendre à une riposte ferme et foudroyante.

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