- Ecrit par Martin Yang
Une enquête formelle sur d’éventuel conflit d’intérêts a été ouverte vendredi contre le ministre français de la Justice, Éric Dupond-Moretti, soupçonné d’avoir usé de son influence politique pour régler des comptes avec des adversaires datant de sa précédente carrière d’avocat.
Il a été interrogé pendant six heures devant la Cour de justice de la République. Le ministre français de la Justice, Éric Dupond-Moretti, a été mis en examen hier pour un prétendu « conflit d’intérêts » entre sa fonction actuelle et ses activités antérieures d’avocat. Une situation inédite en France pour un ministre de la Justice en exercice.
Accusation sans précédente dans le ministère de la Justice
L’inculpation est sans précédent pour un ministre de la justice français en exercice. Après un interrogatoire de près de six heures à la Cour de justice de la République (CJR), le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a été mis en examen vendredi 16 juillet dans le cadre d’une enquête sur de possibles conflits d’intérêts avec ses activités antérieures d’avocat.
Eric Dupond-Moretti a été mis en examen pour prise illégale d’intérêts et sans contrôle judiciaire.
Ni le procureur général de la Cour de cassation, François Molins, qui représente le ministère public dans cette procédure, ni aucun autre représentant du ministère public n’a assisté à cet interrogatoire, a précisé la même source.
Le ministre a été interrogé pendant six heures devant la Cour de Justice de la République (CJR), seule compétente pour juger les membres du gouvernement français pour des faits commis dans l’exercice de leurs fonctions. L’enquête judiciaire se poursuit maintenant et on verra si l’affaire sera finalement jugée ou non.
Avant d’être interrogé, le ministre était serein et particulièrement déterminé. Le ministre de la Justice a été nommé il y a un an par le président à ce poste après une brillante et médiatique carrière d’avocat.
Dupond-Moretti, en poste depuis juillet 2020, dément et accuse à son tour les magistrats politiques pour tenter de changer le chef du portefeuille de la Justice.
Le ministre, qui n’a pas l’intention de démissionner selon ses avocats, a le soutien du président Emmanuel Macron et du Premier ministre Jean Castex. En 2017, lorsque Macron était candidat à la présidence, il était favorable au fait que si un ministre était imputé, il devait démissionner. Aujourd’hui, le président soutient le garde des Sceaux, nom sous lequel le ministre de la Justice est également connu en France.
Pas question de baisser la garde !
Dupond-Moretti nie fermement ces deux allégations, affirmant qu’il n’a fait que suivre les recommandations des fonctionnaires du ministère de la justice. Il a aussi mentionné que les Unions Syndicales des magistrats utilisent ces accusations comme un stratagème pour paralyser ses réformes du système judiciaire français et pour le remplacer en tant que ministre de la justice.
En octobre 2020, le gouvernement Macron a répondu à des mois d’affirmations des Unions syndicale des magistrats selon lesquelles le rôle de Dupond-Moretti au sein du cabinet posait un conflit d’intérêts, en lui retirant son autorité sur toutes les questions relatives à son ancienne carrière d’avocat, donnant au Premier ministre Jean Castex la responsabilité de ces questions.
Maintenant que Dupond-Moretti a été mis en examen, Macron et Castex se sont ralliés à sa défense. “Le ministre de la Justice a les mêmes droits que tout le monde, y compris la présomption d’innocence et la capacité de défendre ses droits, a déclaré le président aux journalistes lors d’une visite au Tour de France vendredi
Le même jour, M. Castex a déclaré dans un communiqué qu’il souhaitait réitérer sa totale confiance en M. Dupond-Moretti et l’encourager à poursuivre ses réformes judiciaires.
En effet, au début du mandat présidentiel de Macron en 2017, son ancien ministre de la Justice, François Bayrou, a rapidement démissionné après avoir fait face à une simple enquête préliminaire pour irrégularité financière dans son parti MoDem. Macron a limogé un autre ministre, Richard Ferrand, après avoir été mis en examen pour avoir été accusé d’avoir fait bénéficier sa femme d’une opération immobilière avec une caisse d’assurance maladie publique.
« Quand un ministre est placé sous enquête formelle, il doit démissionner », a déclaré le chef du Parti socialiste Olivier Faure à la radio France Info, citant mot pour mot une ligne utilisée par Macron en 2017 alors qu’il était en campagne pour sa candidature à la présidentielle.
Quel avenir pour le ministre soutenu par l’exécutif ?
Les enquêtes ordonnées par Dupond-Moretti aux magistrats ont été lancées dans le prolongement des enquêtes réalisées par son prédécesseur Belloubet, a noté le Premier ministre, réitérant les arguments que Dupond-Moretti et ses avocats ont avancés pour sa défense.
D’autres se sont également ralliés à sa défense. Deux députés qui ont également travaillé pour la Cour de Justice en tant qu’avocats professionnels, Naïma Moutchou du parti La République en Marche de Macron et Antoine Savignat du parti conservateur Les Républicains, ont démissionné de la procédure à la suite de l’enquête Dupond-Moretti. Moutchou a déclaré qu’elle refusait de « prendre part à ce semblant de justice » motivée par « la volonté non dissimulée d’une poignée de magistrats de réduire un ministre de la justice à l’impuissance politique ».
Ici se pose cette délicate question : une enquête pourrait-elle compromettre l’avenir d’Éric Dupond-Moretti à la tête de ce ministère ? Il a le soutien d’Emmanuel Macron et de Jean Castex. En fait, il était le choix personnel du Président de la République, ce qui ne peut être réfuté, commente un député de La République En Marche. En revanche, un ministre estime que sa situation est compliquée, surtout quand on est « garde des sceaux ». Le président de la République s’est ce jeudi déclaré « garant de l’indépendance de la justice ». Éric Dupond-Moretti accuse aussi ces mêmes unions de complot politique afin d’obtenir un nouveau ministre de la Justice. Nous ne faisons pas de manœuvres politiques.
Dupond-Moretti, lorsqu’il était avocat, il était un critique virulent des juges et des magistrats. Le ministre de la Justice et le gouvernement Macron pensent qu’il est essentiellement une vendetta, car lorsque Dupond-Moretti a été nommé, il a juré que les magistrats ne feraient pas ce qu’ils voulaient de moi. Alors ils pensent il s’agissait d’actes d’une « vengeance ».