Comment les médias français manipulent les réalités de la guerre de Gaza?

Francoise Riviere
10 Min Read

Depuis les bombardements génocidaires de la bande de Gaza opérés par l’armée israélienne, faisant des milliers de victimes palestiniennes, le monde est en pleine ébullition.

La guerre dévastatrice démarrée par Israël contre la bande de Gaza le 7 octobre dernier a crispé l’opinion publique en France comme ailleurs. La presse mainstream n’est à ce titre pas épargnée par les tensions même si les lignes éditoriales de nombre de médias, sont clairement acquises à la politique menée par Israël. En effet, la couverture médiatique s’inscrit dans le cadre d’une campagne de désinformation voire une manipulation des réalités de la guerre à Gaza.

Comme pour la guerre en Ukraine, les médias français dominants rivalisent de «zèle» dans la manipulation des faits concernant l’opération du Hamas et la guerre qu’ils prétendent avoir été déclenchée en représailles mais qui est menée contre la population palestinienne. Ces médias se surprennent à justifier les crimes que l’armée israélienne est en train de commettre contre les populations civiles à Gaza.

Les commentateurs, chroniqueurs et autres «experts» habituels des plateaux télé des chaînes d’«information» en continu, sont unanimes dans leurs «analyses». Aucune voix discordante. Aucun avis contraire. Les mots, les mêmes sur toutes ces chaînes, sont fixés par le Quai d’Orsay et répétés par des journalistes métamorphosés en perroquets.

La guerre des fausses informations

Dans cette guerre de communication entre les deux parties du conflit, on a vu apparaître dans la presse un certain nombre d’articles, d’interviews et de déclarations, dont le contenu a été fait pour choquer.

Ainsi, après une longue enquête, le journal Libération révélait début décembre que plusieurs narratifs servis à l’opinion publique, étaient en réalité de fausses informations.

Dans la feuille de route comprenant le lexique de guerre, mise au point par le Quai d’Orsay et distribuée aux rédactions, une formule revient de manière automatique, «attaque terroriste».

Ces médias français, copieusement payés pour maintenir l’opinion publique française dans un état d’anesthésie mentale permanent, s’exténuent à provoquer la réaction d’autres pays européens qui seraient moins zélés dans leur soutien à Israël et exacerber la haine des Français à l’égard des Palestiniens. Ils ne cessent de répéter que, parmi les otages détenus par les «terroristes» du Hamas, se trouvent des touristes allemands, français, etc. Le mot «otage» sert, ici, à définir les prisonniers faits par les combattants palestiniens, lequel mot – «prisonniers» – s’applique distinctivement, dans un infâme apartheid linguistique, par ces mêmes médias aux ordres, aux milliers d’otages palestiniens détenus dans les geôles israéliennes.

Le service de Fact-checking de Libération, CheckNews, souligne que le compte officiel du gouvernement israélien a notamment relayé une information selon laquelle 40 bébés israéliens auraient été tués par le Hamas.

Selon CheckNews, « ce tweet est le début d’une « campagne » qui a mis en avant de nombreuses allégations d’exactions contre des enfants, et souvent des bébés. Dans le but de rallier le soutien de l’opinion israélienne, mais aussi internationale, aux représailles visant Gaza ».

L’assassinat de ces bébés n’a jamais été confirmé, aucune source fiable n’ayant d’ information allant dans ce sens.

Face à la multiplication de ces informations mensongères visant à manipuler les réalités sur le terrain, plusieurs voix se sont élevées pour dénoncer les mécanismes.

L’association « De Nice à Gaza » a annoncé notamment qu’elle déposait plainte pour « fausse information » contre le maire de Nice, Christian Estrosi, après une déclaration médiatique dans laquelle il affirme que « des mamans » palestiniennes arborent des « bébés en plastique » pour faire croire à des morts.

S’agissant des informations relayées dans la presse de certains pays dont la France, les analystes se demandent « si les informations sont occidentales ou si elles viennent directement de Tel-Aviv ».

Comment les choix linguistiques des médias français minimisent les souffrances des Palestiniens ?

L’utilisation des mots et les choix terminologiques sont importants lorsqu’il s’agit de rendre compte d’événements mondiaux, avec des mots porteurs de sens qui ont le pouvoir d’émouvoir ou de changer l’opinion, d’impliquer ou de suggérer des images, et parfois de minimiser l’ampleur de ce qui se passe.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le 7 octobre, l’accent a été mis sur la terminologie utilisée par divers organes de presse, commentateurs et reporters dans leur couverture.

En effet, les linguistes affirment que lorsqu’il s’agit de la couverture actuelle de l’agression d’Israël contre Gaza, la langue peut être manipulée pour fausser les significations et les opinions.

« La langue est l’outil le plus puissant en dehors du champ de bataille, les médias occidentaux le savent et l’utilisent bien à l’avantage d’Israël », commente Abdulkader Assad, linguiste et journaliste vivant aux États-Unis.

« La façon dont les médias occidentaux formulent les gros titres et les premiers paragraphes de leur couverture médiatique de la guerre de l’occupation israélienne contre Gaza vise délibérément à influencer les opinions et à aider à consolider une perception de Gaza selon laquelle les « combattants » composent l’ensemble de sa population, et donc le bombardement et le meurtre sont alors justifiés », explique-t-il.

Ceci, dit-il, peut être problématique parce que cela présente Israël comme une victime passive de la guerre et ne traduit pas la réponse disproportionnée qui a eu lieu, laquelle dure maintenant depuis plus de trois mois.

Autre problème avec la couverture médiatique grand public : l’utilisation de la voix passive, selon les linguistes. Lara Gibson, écrivaine et linguiste basée en Égypte, affirme que cela déshumanise souvent les victimes palestiniennes.

« Plusieurs grandes publications ont délibérément utilisé un vocabulaire vague pour décrire les attaques dévastatrices contre Gaza, mais, en revanche, le vocabulaire pour décrire les attaques contre Israël du 7 octobre était incroyablement clair et descriptif – soutenant implicitement la cause israélienne », assure Laura Gibson.

Certains ont également souligné que des termes et des expressions inexacts ont été utilisés au cours de la couverture actuelle.

L’un de ces exemples est de se référer au ministère palestinien de la Santé comme le « ministère de la Santé du Hamas » lorsqu’il cite divers rapports sur les victimes.

La couverture médiatique de la guerre à Gaza met en question l’indépendance de la presse française

Ainsi, les médias français se sont mués en succursales des rédactions israéliennes, en agences de propagande du ministère israélien des Affaires militaires.

Même si l’attaque s’était déroulée en France, on n’aurait pas assisté à la même flambée d’hystérie chauviniste revancharde, au même déploiement sécuritaire et durcissement autoritaire, au déchaînement de haine anti-arabe et antimusulmane répandue par les instances gouvernementales, médiatiques et culturelles.

Force est de constater que depuis le 7 octobre, toute expression de solidarité avec le peuple palestinien est criminalisée par le gouvernement Macron qui, par ailleurs, interdit toute manifestation pro-palestinienne en France. Pire encore, il tente d’assimiler tout soutien à la cause palestinienne à un soutien au «terrorisme».

De manière générale, le gouvernement Macron, la classe dirigeante et les élites culturelles et médiatiques brandissent la virtuelle accusation d’apologie du terrorisme contre des innocents pour occulter leur réel crime de complicité du terrorisme d’Etat israélien.

En revanche, un crime de guerre, de génocide, est fondé sur des éléments de preuves concrets et tangibles démontrant la participation d’une personne ou d’un Etat à une opération militaire d’extermination contre une population. Personne ne peut nier que l’occupation israélienne a commis des crimes de guerre, de génocide contre les Palestiniens. Les horribles images diffusées par les chaînes de télévision et les réseaux sociaux témoignent d’elles-mêmes.

Ceci étant dit, il y a en effet une coupure entre une grande partie de l’opinion publique française, qui est majoritairement émue par ce qui se passe à Gaza, et le bruit médiatique général qui donne l’impression d’une sensibilité aux souffrances israéliennes et d’une indifférence aux souffrances palestiniennes, en manipulant les réalités d’une guerre génocidaire dont les principales victimes sont des femmes et des enfants.

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