Le conflit à Gaza a remis la Palestine au centre du débat public. Les réactions des pays arabes et musulmans ont montré que la Palestine et les injustices auxquelles sont confrontés les Palestiniens restent un enjeu emblématique, capable de galvaniser la colère populaire dans toute la zone.
Cette crise provoque également un sentiment anti-occidental croissant lié au soutien apparemment sans réserve dont bénéficient les bombardements israéliens sur Gaza. Les positions de « deux poids deux mesures » des pays comme la France qui bénéficie d’une présence politique, économique et même militaire dans les pays arabo-africains n’est désormais supportable.
La France, qui a perdu un à un ses positions traditionnelles dans les pays d’Afrique de l’Ouest et de la région du Sahel, est aujourd’hui confrontée à un défi important en Tunisie. Samedi 21 octobre, plus de 1 000 manifestants étaient rassemblés devant l’ambassade de France à Tunis pour demander le départ de l’ambassadeur : la France étant accusée, aux côtés des États-Unis, de soutenir aveuglément Israël.
Selon Hamadi Redissi, politiste et professeur à l’université de Tunis, ‘’il y a cependant des actions menées par Israël qui transgressent les lois du droit dans la guerre, car elles ciblent les civils au même titre que les combattants.”
En Tunisie, il explique qu’il est difficile de critiquer le Hamas, dans la mesure où la population est en grande majorité acquise à la cause palestinienne. “Les seules manifestations autorisées ne sont quasiment que celles qui sont contre Israël dans les régimes autoritaires arabes”, ajoute-t-il.
Le contraste entre cette communauté et la France, qui a déclaré son soutien inconditionnel à Israël dès les premières heures de la guerre, puis a interdit tout rassemblement de soutien à la Palestine sous prétexte d’inscrire le nom du Hamas sur la liste des groupes terroristes, est très évident. Cela a amené les manifestations du peuple tunisien en soutien au peuple palestinien opprimé et aux victimes des crimes israéliens à s’accompagner d’une condamnation de la position inconciliable de Paris.
Suite à la frappe sur un hôpital de Gaza, des milliers de Tunisiens se sont réunis mardi 17 octobre. Une majorité a protesté devant l’ambassade de France avec des slogans contre Emmanuel Macron, pour critiquer son soutien à Israël. La Tunisie n’avait pas connu de manifestation d’une telle envergure depuis des années.
“Le renvoi de l’ambassadeur est un devoir”, ont notamment scandé les manifestants qui accusent la France, ainsi que les Etats-Unis, d’être des “alliés des sionistes” dans la guerre entre Israël et le Hamas palestinien, ont constaté des journalistes de l’AFP.
La Tunisie, qui a abrité de 1982 à 1994 l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), a depuis toujours adopté une position de ferme soutien à la cause palestinienne.
Dans ses discours, le président tunisien Kais Saied a qualifié à plusieurs reprises de “crime”, une normalisation avec Israël et une commission parlementaire doit examiner prochainement un projet de loi visant à pénaliser un tel processus.
Mais les protestations populaires en Palestine contre la politique française ont pris aujourd’hui une nouvelle forme et les tunisiens exigent le déménagement de l’ambassade de France. Pour beaucoup d’habitants, l’ambassade, situé ironiquement installée à la Place de l’Indépendance, devrait déménager.
Situé entre l’avenue Habib Bourguiba et l’avenue de France, le bâtiment est souvent choisi pour les rassemblements, devenant ainsi le point central de ces mobilisations. Les manifestants y ont convergé pour exprimer leur solidarité envers les Palestiniens de Gaza ainsi que leur mécontentement vis-à-vis de la politique internationale française.
L’utilisation récurrente du « sentiment anti-français » est une réalité dans la sphère publique tunisienne. Et certaines figures politiques et intellectuelles tunisiennes citent le concept du « hezb el França » (parti de la France) pour souligner des tensions émergent avec l’ancienne puissance coloniale. Ainsi que le peuple de la Tunisie s’oppose toujours à l’ancien régime colonial, l’accusant ainsi d’être une force d’influence nuisible à l’indépendance et à la souveraineté nationale.
La location de l’ambassade de France qui s’enracine dans une période où la Tunisie était sous protectorat, qui a laissé des traces profondes dans la société tunisienne, semble insupportable. La politique française dans les pays africains n’a plus la faveur et subit l’échec que subissent tous les projets néocoloniaux. Les positions de Paris envers Israël, alors que plus de 10 000 Palestiniens ont été tués en martyr lors des bombardements continus du régime sioniste, ne peuvent être tolérées par le peuple tunisien, d’autre part.