Concept du droit à la légitime défense : le paradoxe historique de l’Occident

Francoise Riviere
10 Min Read
BE'ERI, ISRAEL - OCTOBER 17: IDF Soldiers ride in armored personnel carriers on October 17, 2023 in Be'eri, Israel. As Israel prepares to invade the Gaza Strip in its campaign to vanquish Hamas, the Palestinian militant group Hamas who launched a deadly attack in southern Israel on October 7th, worries are growing of a wider war with multiple fronts, including at the country's northern border with Lebanon. Countries have scrambled to evacuate their citizens from Israel, and Israel has begun relocating some communities on its northern border. (Photo by Alexi J. Rosenfeld/Getty Images)

Le « droit d’Israël à se défendre » est constamment invoqué par ses partisans occidentaux, mais le droit international prévoit qu’Israël ne peut pas à la fois occuper le territoire palestinien et l’attaquer en tant que menace « étrangère », ni traiter ceux qui lui résistent comme des combattants ennemis.

Depuis le début de l’existence de l’entité israélienne, cette justification a été utilisée pour refuser aux Palestiniens le droit à leurs biens, à leurs maisons et à leur liberté. Elle a été utilisée pour justifier le vol des biens palestiniens à la suite des guerres de 1948 et de 1967. Cette rengaine du « droit d’Israël à se défendre » est invoquée à tout bout de champ, non seulement par l’occupation israélienne et ses partisans, mais aussi par les gouvernements amis des États-Unis, d’Europe et d’autres pays.

Alors que les apologistes d’Israël s’obstinent à soutenir son prétendu droit à la légitime défense, ce n’est pas le cas. En effet, en Cisjordanie et à Gaza, il s’agit d’une occupation. Dans le cadre d’une occupation, le peuple occupé a le droit de résister, y compris par les armes, bien que cela signifie que les individus qui y participent sont des combattants et non des civils protégés.

De Paris à Gaza, la bonne résistance, la mauvaise résistance !

Lorsque l’armée allemande occupa la France au début de la Seconde Guerre mondiale, la France fut divisée en deux parties. La première partie, dirigée par le maréchal Pétain, a accepté un compromis avec les forces d’occupation, mais la seconde partie n’a pas cédé à cette humiliation et a choisi la voie de la résistance.

Ils ont fondé la Résistance française, composée de centaines de milliers de Français, hommes et femmes, qui se sont battus pour mettre fin à l’occupation nazie et en ont payé le prix.

Il ne fait aucun doute qu’aucune force d’occupation ne comprend que le langage de la force. La « Résistance française » s’est battue pour la libération de son pays, mais les nazis ont qualifié cette résistance de sabotage et d’opérations terroristes. Ils ont pris en otage des gens ordinaires ont eu recours à des punitions collectives et à des actions violentes. On estime que pendant l’occupation de la France, l’armée hitlérienne a tué 30 000 Français ordinaires et que bien d’autres ont été arrêtés, torturés et déplacés de leur pays d’origine.

La résistance des Français contre les occupants nazis marque un chapitre brillant de l’histoire contemporaine et bien que huit décennies se soient écoulées depuis cette époque, on s’en souvient encore avec fierté, et chaque année des programmes variés sont organisés à cette occasion à Paris et dans d’autres villes.

Supposons que la France soit toujours occupée par les Allemands. L’écoulement de 80 ans changerait-il l’équation de l’occupation et de la résistance ? Quelqu’un pourrait-il dire que depuis 80 ans, la résistance ne sert à rien et qu’il faut abandonner et dire adieu au pays et à l’identité qu’on appelle la France ? Quelqu’un d’autre que l’occupant blâmerait-il la « résistance française » et l’accuserait-il de violence et de terrorisme?

L’histoire de l’occupation de la France par l’armée allemande et la situation du régime israélien et de l’occupation de la terre palestinienne présentent des similitudes intéressantes. Les occupants israéliens accusent également les combattants palestiniens de terrorisme. La question qui se pose est de savoir comment se fait-il que la résistance française soit honorable et admirable, mais que la résistance palestinienne soit qualifiée de terrorisme et condamnable?!

La guerre de Gaza révélatrice de la duplicité et de la complicité des pays Occidentaux

Un combattant de la liberté pour l’un est taxé de terrorisme pour un autre. Cette expression est une question controversée et débattue dans les milieux universitaires depuis des années, en particulier dans les études sur les mouvements sociaux de libération anticoloniaux et anti-occupation, ainsi que dans les études sur le terrorisme. Cette vision contrastée d’un même phénomène sera différente en fonction de la tendance intellectuelle, de la clarification du moment ou du point de départ d’un événement et de ses acteurs et du fait de prêter ou non attention au contexte historique du sujet étudié.

Depuis Ernesto Che Guevara et Nelson Mandela jusqu’à Yasser Arafat et d’autres combattants palestiniens contre Israël, tout le monde est soumis à cette différence de jugement.

Ernesto Che Guevara, guérillero et théoricien révolutionnaire et l’une des principales figures de la révolution cubaine, est décrit et présenté comme un terroriste par ses détracteurs mais un sauveur par ses partisans, incarnation vivante de la révolution, un révolutionnaire honnête et engagé et, selon les mots de Nelson Mandela, « une source d’inspiration pour toute personne qui aime la liberté».

Nelson Mandela ne fait pas exception à cette règle. Lui et son organisation, le Congrès national africain, ainsi que de nombreux autres Noirs d’Afrique du Sud pendant la lutte contre le régime de l’apartheid étaient considérés comme des terroristes par de nombreux hommes politiques occidentaux tels que Reagan, Bush, Thatcher, etc.

Le même point de vue existe concernant les groupes de résistance comme le Hamas et le Jihad islamique qui croient que « tant qu’il y aura une occupation, il y aura une résistance armée ». Ces groupes sont présentés par Israël et l’Occident comme des terroristes, alors que les nations libres du monde considèrent la résistance comme des combattants de la liberté.

Résistance contre l’occupation israélienne, une bataille pour la liberté

Les médias mainstream et les responsables occidentaux, en ignorant délibérément le contexte historique de l’opération du 7 octobre et l’oppression historique envers la Palestine, tentent de faire croire que la guerre et la violence dans les territoires occupés ont commencé avec l’attaque du Hamas, alors que cette opération devrait être examinée dans un cadre plus large.

L’opération Tempête d’Al-Aqsa tout comme n’importe quel autre conflit anticolonial dans le cadre de « la lutte et de la résistance d’un peuple contre l’occupation », est considérée par beaucoup comme un combat légitime contre un gouvernement illégitime et colonial. Il s’agit en effet d’une riposte à 75 ans d’occupation, de répression, de discrimination, d’humiliation, de génocide, de nettoyage ethnique progressif des Palestiniens par Israël depuis 1948, de déplacement de millions de personnes, de déni de leur droit à la vie, de déshumanisation des Palestiniens et de violation constante de leurs droits de l’homme avec le soutien des gouvernements occidentaux.

L’opération du 7 octobre était alors celle d’une population à bout de souffle contre un gouvernement cherchant à exterminer les principaux propriétaires de la terre palestinienne. Ces derniers ont essayé toutes les méthodes diplomatiques sans avoir pour autant obtenu de résultats. Pour cette raison, la lutte des Palestiniens contre l’occupation doit être considérée comme une lutte pour la liberté et non comme une action terroriste.

En revanche, l’occupation israélienne, qui s’appuie sur le soutien sans faille et inconditionnel de l’Occident, a massacré plus de 14 000 civils palestiniens au cours des 47 jours en invoquant la légitime défense et dans le cadre de sa politique de nettoyage ethnique contre les Palestiniens.

Il serait alors erroné de penser que de telles actions créeront un environnement plus sûr pour Israël. Tout comme 75 années de crimes, d’occupation et d’oppression n’ont pas fait oublier aux Palestiniens leur terre et leurs droits, ces atrocités et la persistance l’occupation n’y feront pas obstruction non plus. Au contraire, elles ne feront qu’aggraver des blessures historiques et de rendre les Palestiniens plus déterminer à continuer leur lutte pour libérer leur patrie des griffes de l’occupation.

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