Pourquoi Macron ambitionne-t-il de se rendre au sommet des BRICS ?

Francoise Riviere
9 Min Read

Le Président français, pourra-t-il devenir le premier homme d’État occidental à pouvoir assister au sommet des BRICS? À en croire le journal L’Opinion, Emmanuel Macron a effectivement formulé cette demande auprès de son homologue sud-africain.

Le magazine français L’Opinion a écrit qu’Emmanuel Macron aurait demandé à Cyril Ramaphosa de pouvoir venir au sommet des BRICS, qui se tiendra fin août en Afrique du Sud.

Cette possibilité aurait été discutée lors des conversations téléphoniques entre les Présidents français et sud-africain début juin, selon l’article publié le 12 juin. D’après les informations de L’Opinion, l’État africain n’a pas indiqué s’il était prêt à accorder à d’autres dirigeants internationaux la possibilité de participer au sommet.

Pourtant, selon l’article de L’Opinion, la demande de Macron a été attribuée concernant un « sommet du club très fermé des BRICS à l’automne prochain ». Quant à la réunion du groupe, elle aura lieu du 22 au 24 août à Johannesburg.

La réaction de Moscou n’a pas tardé à venir : La France doit expliquer pour quelles raisons Emmanuel Macron voudrait se rendre au prochain sommet des BRICS en Afrique du Sud, a fait savoir la porte-parole de la diplomatie russe. Surtout que Paris ne fait pas partie du club des émergents et n’a jamais éprouvé la moindre politesse à son égard.

« Ce serait bien qu’ils disent pourquoi ils veulent se rendre à cette réunion. Soit ils veulent à nouveau établir une sorte de contact pour montrer l’activité de Paris, soit il s’agit d’une sorte de cheval de Troie, qu’ils le disent eux-mêmes », a déclaré Maria Zakharova, porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères.

La diplomate a souligné qu’il s’agit d’une organisation dont la France ne fait pas partie et vis-à-vis de laquelle ils n’ont même jamais éprouvé la moindre politesse, sans parler de bonnes intentions et de sentiments.

Les BRICS, acronyme regroupant le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, suscite de plus en plus d’intérêt de la part de nombreux États et est capable de faire concurrence à l’ordre économique occidental.

À ce jour, presque une vingtaine de pays, dont l’Arabie saoudite ou encore la Turquie et l’Égypte, ont exprimé leur souhait de rejoindre le groupe.

Si Macron assistait au sommet, il serait le premier dirigeant d’un pays du G7 à le faire, faire partie d’une enceinte qui veut concurrencer la gouvernance mondiale sous leadership américain. En effet, les dirigeants des BRICS et Macron partagent apparemment le désir de refondre l’ordre financier et géopolitique mondial.

L’Élysée organise les 22 et 23 juin au Palais Brongniart à Paris un sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Promoteur d’un multilatéralisme rénové, le président français plaide pour une refonte du système hérité de la Seconde Guerre mondiale en prenant en compte l’émergence des puissances du Sud afin d’éviter une fragmentation avec les pays occidentaux. Une quarantaine de chefs d’État et de gouvernement sont attendus. Ramaphosa doit assister à la conférence, et une rencontre cordiale entre lui et Macron pourrait préparer le terrain pour que le président français entre dans l’histoire à Pretoria.

Cependant, les relations de Macron avec le reste du bloc BRICS – le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine – sont au mieux houleuses, et Paris a envoyé des messages mitigés à ces nations. Par exemple, Macron a appelé à des négociations de paix en Ukraine et s’est présenté comme un médiateur potentiel, mais a soutenu l’Ukraine en continuant d’envoyer des armes lourdes à Kiev.

De même, Macron a affirmé que l’Europe ne doit pas suivre les États-Unis dans une confrontation avec la Chine et s’est opposé à l’ouverture d’un bureau de liaison controversé de l’OTAN au Japon.

Cependant, il a signé le mois dernier un communiqué commun avec d’autres dirigeants du G7 qualifiant la Chine de plus grand défi pour la sécurité et la prospérité mondiales, une position identique à celle des États-Unis.

Pendant ce temps en Afrique, les condamnations de la Russie par Macron ont irrité les anciennes colonies françaises sur le continent, qui voient en Russie un partenaire plus fiable que l’ancienne puissance coloniale.

Depuis que le terme a été inventé pour la première fois en 2001, BRICS est passé d’un acronyme à une alliance informelle qui a dépassé le bloc du G7 dirigé par les États-Unis dans sa part du PIB mondial, possède sa propre banque de développement et compte l’Arabie saoudite, l’Algérie, l’Iran et l’Argentine parmi 19 membres potentiels.

Cet élargissement, qui sera étudié lors du prochain sommet des Brics, en août, pourrait permettre d’accueillir des pays de poids, riches en ressources naturelles, et dont le ralliement est stratégique alors que la guerre en Ukraine a bouleversé le marché de l’énergie.

Dans une telle situation, la France semble s’être rendu compte des changements historiques et géopolitiques qui s’opèrent dans le paysage mondial. Macron lui-même a fait des déclarations surprenantes à plusieurs reprises, démontrant un certain niveau d’autonomie vis-à-vis de Washington, ce qui donne l’impression qu’il ne serait pas particulièrement étrange que Macron assiste au sommet des BRICS.

Les pays membres du BRICS sont tous des économies émergentes représentant les intérêts des pays en développement au sein de la communauté internationale. Mis à part d’autres facteurs spécifiques et complexes, dans le contexte de la division croissante entre le Nord et le Sud, l’Est et l’Ouest et l’intensification des affrontements entre les camps, Macron entendrait-il alors de surmonter les contraintes idéologiques, de franchir les barrières géopolitiques et de briser les schémas mentaux et conceptuels ?

Macron a souligné que l’Europe devrait rechercher une « autonomie stratégique » et que la France a également une tradition de diplomatie indépendante. Si la France pourrait véritablement servir de pont entre les différents camps dans les divisions et les clivages du monde, elle saura sans aucun doute marquer son statut international et créer des réalisations historiques.

L’ambition affichée de Macron a démontré l’énorme influence du mécanisme de coopération des BRICS. BRICS”adhère au principe du multilatéralisme, attirant des dizaines d’économies émergentes et de pays en développement à participer au processus de coopération, qui coïncide avec le nouveau multilatéralisme soutenu par la France et l’Europe.

Contrairement à un petit cercle comme le Groupe des Sept (G7), le mécanisme BRICS existe en tant que plate-forme émergente pour la gouvernance mondiale. Il adhère à l’ouverture, à la coopération et aux résultats gagnant-gagnant, et forge un partenariat de développement mondial uni, égal, équilibré et inclusif. Et étant donné qu’ils veulent sincèrement promouvoir la coopération et le développement, les pays BRICS accueillent davantage d’entités pour participer à la coopération mondiale pour le développement, y compris la France.

Ceci dit, même si les déclarations d’Emmanuel Macron ont fait polémique et suscité de vives réactions, elles expriment néanmoins le refus d’un monde gouverné par la seule puissance des Etats-Unis.

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