La précarité de l’emploi en France : Un bref aperçu de la lutte de la classe ouvrière française contre les politiques néolibérales de Macron

Francoise Riviere
10 Min Read

Depuis la mi-janvier, le calendrier français est marqué par une série de grèves et de rassemblements d’une journée. Ils s’inscrivent dans le cadre d’une campagne coordonnée conjointement par les différentes confédérations syndicales françaises contre les réformes de Macron visant à relever l’âge de la retraite et à abolir les régimes spéciaux de pension pour les travailleurs d’industries telles que les chemins de fer, l’électricité et les services publics.
Ces réformes font partie des efforts du gouvernement français pour faire progresser l’austérité néolibérale et financer les guerres impérialistes en cours en Afrique de l’Ouest ou contre la Russie en Europe de l’Est. L’État français entend réduire ses dépenses en matière de protection sociale, obligeant les travailleurs à travailler plus longtemps dans leur vie et augmentant ainsi la précarité de l’emploi.
Ces réformes auront pour conséquence que les femmes, ainsi que d’autres secteurs marginalisés et racisés de la société, travailleront plus longtemps et, bien sûr, pour moins cher.
Le 16 février, 1,3 million de travailleurs ont participé à une grève, la cinquième d’une série de manifestations en réponse aux mesures néfastes de Macron, qui ont mis en péril leur sécurité d’emploi.
Le samedi 11 janvier, 2,3 millions de manifestants étaient dans les rues ; le 7 février, un peu moins de 2 millions ont participé à une grève à l’appel d’une alliance syndicale ; et les 19 et 31 janvier, plus de 2 millions ont participé à des grèves.
Ces rassemblements sont les plus importants depuis les années 1980 et ont dépassé les rassemblements et les grèves nationales de 2010 contre les réformes des retraites de l’ancien président Nicolas Sarkozy.
Bien que les réformes de Macron aient suscité des protestations et des grèves, ce ne sont pas seulement les réformes des retraites qui ont fait descendre les gens dans la rue. Les grèves nationales sont également l’occasion de protester contre l’inflation, l’augmentation du coût de la vie (de la nourriture au loyer et à l’électricité), la stagnation des salaires, la précarité croissante de l’emploi et, plus généralement, la politique d’austérité néolibérale imposée aux services sociaux.
La profondeur et la répartition des grèves à travers la France sont particulièrement remarquables. Les plus grandes manifestations ont, comme prévu, eu lieu à Paris (de 400 000 à 500 000 personnes chaque jour), avec de grandes manifestations dans d’autres grandes villes (le 11 février, 80 000 personnes à Bordeaux, 150 000 à Marseille et 100 000 à Toulouse). Cependant, des manifestations ont également eu lieu dans de nombreuses petites et moyennes villes, ces manifestations étant bien plus importantes en proportion que celles des grandes villes. Dans certains cas, entre un quart et un cinquième de la population y a participé.
Ces chiffres élevés sont dus en grande partie à une solidarité quelque peu inattendue entre les différentes confédérations syndicales françaises. En 2010, la direction de la CFDT (Confédération française démocratique du travail, une fédération syndicale collaborationniste de droite) a poignardé le mouvement ouvrier dans le dos, en négociant avec Sarkozy pour briser le mouvement contre la réforme des retraites et en aidant le gouvernement à faire passer l’âge de la retraite de 62 à 64 ans. Cette fois-ci, du moins pour l’instant, la direction du syndicat soutient le mouvement contre la réforme des retraites, appelant ses membres dans la rue, les rassemblements dans de nombreuses villes étant composés jusqu’à un tiers d’adhérents de la CFDT.
La question qui se pose est la suivante : “Comment la lutte va-t-elle s’intensifier ?”. En outre, combien de temps durera cette coopération intersyndicale sans précédent ? Est-ce simplement une question de temps avant que la CFDT (ou toute autre fédération, d’ailleurs) ne se retourne contre la classe ouvrière et ne négocie avec Macron dans le but d’aider à introduire une série de réformes plus “acceptables” de la retraite ?
Jusqu’à présent, la direction de la CFDT a utilisé son influence dans l’alliance syndicale pour poursuivre une stratégie explicitement pacifiste, réformiste et électorale, dans l’espoir d’impressionner Macron avec de grandes participations et de le persuader d’abandonner les réformes dans l’intérêt de la démocratie.
Mais si une chose devient claire, 2 millions de personnes manifestant pacifiquement dans la ville un ou deux jours par semaine ne suffisent pas à forcer Macron à abandonner ses attaques contre la classe ouvrière française. De plus, si l’histoire française a démontré une chose, c’est qu’il n’y a pas de pires amis des beaux jours que les bureaucrates syndicaux, dont le rôle est de servir d’intermédiaire pour la paix sociale entre les oppresseurs capitalistes et la main-d’œuvre française appauvrie. En d’autres termes, ils cherchent à améliorer les conditions dans lesquelles le travail est exploité par le capital, aggravant ainsi la précarité de l’emploi.
En outre, les bureaucrates syndicaux peuvent agir comme un frein aux mouvements révolutionnaires des travailleurs, comme la CGT l’a fait lors de la grève générale de mai 1968. Malgré le fait qu’une insurrection ouvrière ait forcé Charles De Gaulle à fuir le pays, la perfide direction syndicale a contribué à briser la grève, en convainquant les travailleurs de reprendre le travail et en assurant le retour de De Gaulle en échange d’augmentations salariales mineures. Et bien sûr, les syndicats de droite comme la CFDT ne font pas exception.
L’un des résultats possibles est que les réformes seront néanmoins adoptées par le Parlement, et que la CFDT déplorera la décision tout en insistant sur le fait qu’elle doit être respectée, en tentant de démobiliser la classe ouvrière “jusqu’aux prochaines élections” ou au moins de diviser et d’isoler les véritables confédérations syndicales.
Il est contraire au sentiment populaire des travailleurs en France de collaborer avec le régime de Macron, en limitant la lutte à des actions symboliques ou à l’électoralisme. Cela est évident dans les commentaires des travailleurs à travers le pays, à la fois ceux qui participent et ceux qui n’ont pas encore rejoint les grèves nationales. Ils indiquent un sentiment clair que les grèves d’un jour ne sont pas suffisantes.
Les syndicats doivent proposer une stratégie claire et intensifier la lutte. Parmi les propositions, citons les grèves prolongées, les blocages des transports et les coupures de courant dans l’industrie. Le mouvement actuel a le potentiel d’être énorme, peut-être pas autant que la grève générale de mai 68, qui a paralysé le régime capitaliste en France pendant deux mois et a mis la nation au bord d’une véritable situation révolutionnaire, mais pas loin de l’énorme grève de trois semaines en 1995 contre les réformes néolibérales de la sécurité sociale du gouvernement Chirac.
Pour gagner la lutte contre les réformes, la classe ouvrière française devra développer ses propres organes d’organisation afin de coordonner de nouvelles actions dans la rue et dans les communautés.
Il faut dire qu’il y a effectivement des sections plus militantes du mouvement syndical qui poussent à des actions fortes, en particulier dans le rail et l’électricité, où le militantisme des travailleurs est déjà allé bien au-delà de la participation à des grèves isolées d’une journée.
La participation des étudiants au mouvement a également été exemplaire, avec la mise en place d’assemblées générales permanentes dans plusieurs universités par le biais d’occupations étudiantes à travers le pays, dans le but de soutenir, de construire et d’intensifier la lutte contre les réformes des retraites de Macron. Au cours de la semaine dernière, cependant, de nombreuses occupations d’universités ont fait l’objet d’une répression violente de la part de l’État, la police ayant expulsé des étudiants des universités de Lille et de Tolbiac le 16 février. Néanmoins, malgré la répression, les étudiants ont continué à soutenir la classe ouvrière française et la sécurité de l’emploi des travailleurs français.

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