Conseil national de la refondation ; Instance de dialogue politique

Francoise Riviere
8 Min Read

Le président Emmanuel Macron a entamé un nouveau plan politique afin de se servir d’une large consultation nationale à propos des questions allant de l’éducation à l’euthanasie en passant par le changement climatique, dont certaines pourraient être soumises à référendum. En donnant le coup d’envoi du « conseil national de la refondation », Macron a déclaré qu’un site Internet serait mis en place pour permettre aux électeurs de s’exprimer sur des « choix cruciaux », dans le cadre de sa promesse de faire en sorte que les citoyens se sentent plus impliqués dans son gouvernement.

Le boycott de l’opposition ternit la nouvelle expérience participative de Macron. Le président lance le Conseil national de la refondation, une instance de dialogue politique pour préparer la France aux défis des prochaines années. L’expérience de démocratie participative qui devait marquer le second quinquennat d’Emmanuel Macron a mal démarré. À huis clos et sans la présence de l’opposition parlementaire, qui a boycotté l’événement, le président français a inauguré le Conseil national de la refondation (CNR). Le nom s’inspire du Conseil national de la Résistance qui, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, a jeté les bases de la France moderne et de son État-providence.

Le Conseil, en fait, s’apparente davantage aux consultations citoyennes qui, en 2019, ont répondu à la révolte des gilets jaunes ou à la convention qui, en 2020, a abordé la crise environnementale. Le CNR est censé aider la France à faire face aux bouleversements du XXIe siècle par le dialogue entre la classe politique, la société civile et les citoyens. Les critiques y voient un dispositif de propagande destiné à contourner un parlement dans lequel le président ne détient plus la majorité absolue. Macron a annoncé le projet début juin, quelques semaines après avoir été réélu à l’élection présidentielle pour un second et dernier mandat, et en pleine campagne pour les élections législatives. Le CNR était censé illustrer la « nouvelle méthode » de gouvernement du président.

Au cours de son premier mandat, il a été accusé de gouverner de manière excessivement descendante : les décisions étaient concentrées sur un seul homme et en un seul lieu, le palais de l’Élysée. On lui a reproché de ne pas tenir compte de l’opposition et des partenaires sociaux. La « nouvelle méthode » devait donner naissance à un style plus horizontal, à l’écoute des Français ordinaires. En période d’abstention record, de méfiance généralisée à l’égard de la classe politique et d’éruptions de colère populaire telles que les gilets jaunes, la réponse a été plus de participation et de délibération.

La réalité est plus compliquée. Macron a invité ce qu’il appelle « les forces de la vie » à la journée d’ouverture du CNR, au Centre national de rugby de Marcoussis, près de Paris. Il a envoyé 52 invitations : 12 ont été refusées. Ce sont des refus de poids : les principaux partis d’opposition (insoumis, socialistes, écologistes et communistes à gauche ; Les Républicains et le Rassemblement national à droite), les syndicats CGT et Force ouvrière, et le conservateur Gérard Larcher, président du Sénat et deuxième plus haute autorité de l’État.

Avant d’entrer dans la réunion, Macron a déclaré à la presse : « Celui qui n’est pas là ne pourra pas aller expliquer après coup qu’il n’a pas été consulté, qu’il est trop vertical et que ceci ou cela ». Le CNR abordera les questions qui définiront l’avenir de la France, telles que l’école, la santé, la transition environnementale, le vieillissement de la population et le plein emploi. Le président a fixé trois objectifs. D’abord, « construire un consensus sur la situation de la France et son avenir ». Ensuite, « remettre les Françaises et les Français au cœur de ces grandes décisions ». Et troisièmement, « action ». La CNR, qui sera ouverte au public avec des consultations en ligne et des réunions dans tout le pays, doit déboucher sur des plans concrets adaptés à chaque territoire. Un référendum ? « Je n’exclus rien », a répondu Macron.

On parle dans un éditorial d’un « simulacre de démocratie directe » et écrit que « le plus inquiétant » est que « cette nouvelle méthode de gouvernance cache moins une volonté de dialogue pour trouver des solutions qu’une absence d’objectifs ». On estime également que le boycott de l’opposition « revient à nier la gravité de la crise démocratique ».

Les précédents des cinq premières années (le grand débat national sur les gilets jaunes et la convention des citoyens pour le climat) se sont soldés par un bilan ambivalent. Avec le grand débat, Macron a montré qu’il était capable de débattre pendant des heures avec les maires et les citoyens de tout le territoire et cela l’a aidé à calmer les esprits au lendemain de la révolte. La convention sur le climat a abouti, après des mois de rencontres citoyennes, à un ensemble de propositions que le président n’a que partiellement reprises.

Aucune des deux expériences de démocratie participative n’a dissipé l’image, répandue chez certains citoyens, d’un chef d’État arrogant et déconnecté des réalités du pays. Mais à l’époque, il gouvernait avec une majorité absolue ; maintenant, il gouverne avec une majorité relative, ce qui l’oblige à conclure des pactes avec l’opposition. Le Parlement a retrouvé la pertinence qu’il avait perdue au cours des cinq dernières années. Le déficit démocratique de la France, auquel le CNR doit répondre, a été atténué. Aujourd’hui, Macron ne peut plus gouverner seul et avec du commandement et du contrôle. Même s’il le voulait.

Les réticences du CNR s’expliquent par les « promesses non tenues » des exercices de consultation passés, sous la forme du « Grand débat » et de la Convention citoyenne pour le climat. « Ces deux expériences précédentes ont été perçues rétrospectivement à tort ou à raison, comme de simples exercices de communication qui n’ont abouti à aucun résultat tangible », a-t-il expliqué à l’AFP. Du côté du parti au pouvoir, l’ancien Premier ministre Edouard Philippe a déclaré que la proposition d’organiser des référendums permettrait sûrement de lever les doutes sur l’efficacité de la CNR. L’Elysée a déclaré que le CNR devrait démarrer rapidement, avec les premiers projets, sur l’école et la santé, opérationnels « en 2023 ». Le suivi des travaux a été confié au Haut Commissaire au Plan, François Bayrou, qui a déjà concédé que la tâche s’annonce « très difficile ».

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